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Lobodis, Frédéric Lerebour : le pionner du commerce équitable devient entreprise à mission

Créé en 1988, Lobodis est engagé dans le commerce équitable depuis ses origines. Le développement du torréfacteur breton s’est appuyé au fil des ans sur une démarche RSE très forte, incluant valeurs sociétales et environnementales. En inscrivant aujourd’hui sa raison d’être « respecter, agir durablement et partager quotidiennement » dans ses statuts, Lobodis passe à la vitesse supérieure en pérennisant son modèle d’entreprise vertueuse.

Frédéric Lerebour, directeur exécutif Lobodis

Frédéric Lerebour, directeur exécutif Lobodis ©Studio Carlito

Lobodis affirme sa singularité depuis ses débuts. Tout commence en 1988. À l’époque la plupart des cafés proposés à la vente sont issus d’un mélange de cafés aux diverses origines réalisé par des torréfacteurs. Olivier Bernadas, le fondateur de l’entreprise, souhaite donner une nouvelle dimension à la dégustation de café en allant chercher du pure origine, du café de terroir.

Des relations gagnant-gagnant avec les producteurs

Commence alors une aventure humaine auprès des petits producteurs de café, qui pour 80 % d’entre eux sont des familles qui cultivent moins de 10 hectares de terre. « Pour assurer l’achat du café auprès de ces familles, il a fallu créer des relations gagnant-gagnant » explique Frédéric Lerebour, directeur de production de l’entreprise depuis 2006 et directeur exécutif depuis 2018. « Sécuriser un volume d’achat, garantir un prix juste et aider nos producteurs à se structurer. Nous nous sommes donc engagés dans le commerce équitable, même si je préfère aujourd’hui parler d’achats responsables, car les labels ne font pas tout ». Lobodis assure ainsi depuis 1993 un prix plancher aux producteurs, une relation dans la durée et des primes destinées à aider au développement de la communauté : construction de route, éducation, formation en agronomie, gestion, commercialisation… Aujourd’hui l’entreprise travaille avec 25 organisations de producteurs dans 14 pays différents sur une durée moyenne de partenariat de 8,5 ans.

Lobodis

Lobodis ©StudioCarlito

L’autonomie au cœur de la démarche sociétale

L’engagement de l’entreprise se traduit rapidement dans sa propre organisation. En 1994, Lobodis noue un partenariat unique avec l’ESAT « CAT Notre Avenir » à Bain-de-Bretagne et y implante son unité de torréfaction, complétée en 2001 par une plateforme logistique. « Intégrer des personnes en situation de handicap fait partie de notre démarche et de notre projet », souligne Frédéric Lerebour. Aujourd’hui une cinquantaine de personnes en situation de handicap, soit l’équivalent de 25 emplois temps plein travaillent sur le site « avec une activité adaptée et intégrée à leur parcours d’épanouissement ». Dans le cadre de ce partenariat avec l’ESAT, Lobodis reçoit en 2020 le Trophée de la reconnaissance, décerné par le réseau Différent et Compétent, pour son engagement dans la reconnaissance et la valorisation des compétences.

Commerce équitable : le label Fairtrade/Max Havelaar impose un prix minimum dans le café, fixé à 1,4 USD/livre de café. S’ajoutent la prime de développement de 0,20 USD/Livre et une prime bio de 0,30 USD/Livre pour inciter à produire en bio.

Lancement de la démarche RSE « Act & respect »

En 2016, Lobodis formalise l’ensemble de ses engagements avec la démarche « Act and Respect ». « Nous avions engagé depuis longtemps notre démarche responsable en agissant sur l’ensemble de la filière, des producteurs aux salariés, avec l’emploi de personnes en handicap, mais aussi dans la construction de relations pérennes avec notre écosystème et ses parties prenantes. Il faut bien comprendre que les démarches responsables s’opèrent sur du temps long. Avec « Act and Respect », il s’agissait, trente ans après notre création, de formaliser ce que nous étions, reposer nos fondamentaux, pourquoi nous faisions acte d’entreprise. » Lobodis affiche ainsi ses engagements sur « le respect des hommes dans leurs différences », « la protection de l’environnement sur le territoire de l’entreprise et les terroirs caféiers », « la construction d’une filière responsable de la terre à la tasse » et « la préservation du développement et des savoir-faire du territoire ».7

L’entreprise à mission, une suite logique

C’est donc sans surprise que Lobodis franchit aujourd’hui une étape supplémentaire sur le chemin de sa démarche éco-responsable en devenant entreprise à mission « la proposition faite par le modèle de l’entreprise à mission nous convient, car elle permet de poser sa raison d’être et ses principes directeurs, et surtout de l’inscrire dans ses statuts. L’entreprise à mission garantit la pérennité de notre modèle et de nos relations avec les parties prenantes engagées comme les producteurs, le CAT Notre Avenir… Elle grave ainsi dans le marbre nos engagements, qu’importe les dirigeants. Le projet devient la clé de voute ». Une raison d’être résumée par la devise « respecter-agir durablement et partager quotidiennement ».

L’entreprise à mission

L’article 176 de la loi du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises (loi Pacte) introduit la qualité de société à mission. Il s’agit pour une entreprise d’affirmer publiquement sa raison d’être, ainsi qu’un ou plusieurs objectifs sociaux et environnementaux qu’elle se donne pour mission de poursuivre dans le cadre de son activité. Ces éléments doivent être inscrits dans les statuts. Le décret du 2 janvier 2020 prévoit par ailleurs la vérification par un organisme tiers indépendant (OTI) de l’exécution par la société à mission des objectifs sociaux et environnementaux mentionnés dans ses statuts.

Poisson-pilote

Lobodis a été racheté en 2008 par le groupe Ricardo qui détient par ailleurs les Cafés Richard, Expresso Service, l’Académie du Café, Comptoirs Richard, Alto café et la Brûlerie des Gobelins. « Le groupe a toujours encouragé Lobodis à faire évoluer sa démarche RSE, à cultiver sa singularité. Notre projet et notre fonctionnement sont observés, nous sommes un peu le poisson-pilote du groupe, un creuset d’innovation. La famille Richard nous donne les moyens de cultiver notre différence et de mener nos actions. »

Les démarches responsables s’opèrent sur du temps long

Lobodis en quelques dates

1988 : Création de la société Lobodis, en Bretagne (22)

1993 : Premier torréfacteur et importateur français à s’engager pour un commerce équitable auprès de Max Havelaar France. Labellisation officielle en 1994

1994 : Création de l’unité de torréfaction Lobodis en partenariat avec le CAT de Bain de Bretagne

2008 : La famille Richard devient actionnaire unique de Lobodis

2016 : Lobodis formalise sa démarche RSE, baptisée Act&Respect

2017 : Lobodis obtient le label Entrepreneur + Engagé

2018 : Fermeture et transfert du siège de Saint-Brieuc à Bain-de-Bretagne

2021 : Lobodis devient entreprise à mission

Et dans 5 ans ?

Aujourd’hui Lobodis affiche un chiffre d’affaires de 10 millions d’euros, emploie 25 salariés en CDI, 9 alternants et stagiaires longue durée. Si l’entreprise ambitionne un CA de 15 millions d’euros d’ici 2026 elle souhaite également que « le projet de Lobodis aille encore et toujours plus loin, à force d’innovation. Et surtout que l’entreprise responsable que nous sommes, soit vraiment utile à ses collaborateurs, à la société, à la planète. »

Frédéric Lerebour, directeur exécutif Lobodis

Frédéric Lerebour, directeur exécutif Lobodis ©Studio Carlito

LA question à Frédéric Lerebour

Quelle est votre tasse de café?

J’aime beaucoup le café de Papouasie qui est assez complet, assez rond. Aujourd’hui, la tendance est aux cafés acides, mais ce n’est pas trop mon truc !