Tout commence à Val-d’Izé, près de Vitré (35), dans un atelier de menuiserie qui, après avoir connu de belles années, était promis à la liquidation judiciaire. En 1999, à la veille de ses 28 ans, Pierre-Yves Lebel rachète l’entreprise en difficulté à la barre du tribunal. Il en fait, en deux décennies, Lebel Agencement, une PME de 24 salariés spécialisée dans le mobilier sur mesure, qui a dégagé 2,4 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2024, dont plus de 50 % à Paris. « Notre savoir-faire repose sur le bois massif et une gestion intégrée de la fabrication : nos poseurs sont aussi les menuisiers qui ont conçu le meuble », insiste le dirigeant. Depuis, l’entreprise a déménagé à La Mézière et l’atelier s’est doté d’outils numériques. Il vient de faire l’objet d’un agrandissement de 500 m², pour un investissement proche du million d’euros. Un signe de confiance dans l’avenir, malgré un contexte économique chahuté.
Une vision globale
Fin 2022, Lebel Agencement connaît un sérieux passage à vide. L’activité ralentit, les perspectives s’amenuisent et l’incertitude gagne l’atelier. « Nous nous sommes demandé si on allait passer l’hiver », soupire Pierre-Yves Lebel. Pour relancer la dynamique, l’entreprise affine sa stratégie commerciale et renforce sa visibilité. Des efforts qui paient. Les liens avec les donneurs d’ordre se réactivent tandis que les projets affluent de nouveau. Si Lebel Agencement avait déjà collaboré par le passé avec des enseignes prestigieuses comme Cartier, elle s’attache désormais à consolider sa présence sur des chantiers plus contemporains, en lien avec des architectes et décorateurs de renom.
Je suis un créatif, je dessine tout à la main. Les clients viennent chercher une vision, pas seulement des plans
Mais Pierre-Yves Lebel ne conçoit pas l’agencement sans vision d’ensemble. En 2001, il fonde La Belle Étude, une agence d’architecture commerciale qui signe des concepts pour des commerces, des restaurants ou des hôtels. Si la structure ne compte plus que quatre salariés aujourd’hui, elle a marqué de son empreinte plusieurs dizaines de restaurants à Rennes, et reste le cœur conceptuel du groupe. « Je suis un créatif, je dessine tout à la main. Les clients viennent chercher une vision, pas seulement des plans », résume-t-il. Dernièrement, Label Études a conçu le village médiéval du Domaine des Ormes, près de Dol-de-Bretagne, un chantier d’exception mené pendant trois ans. Mais le dirigeant souhaite lever le pied pour se recentrer sur ses autres activités. « Ce genre de projet, c’est peut-être ce que j’ai fait de plus beau dans ma vie professionnelle », confesse-t-il.
Diversification des activités
Troisième pilier du groupe, L-DÉCO, créée en 2007 avec son épouse Johanne, s’est spécialisée dans la distribution et l’aménagement de cuisines pour promoteurs et particuliers. Exit les meubles et luminaires, la société s’est structurée autour d’un modèle plus industriel, en se fournissant aux côtés d’un fabricant allemand. Les cuisines L-DÉCO équipent entre autres des résidences Lamotte, Launay, Batimur ou encore Bouygues.
À Fleur de Rance a dégagé près de 500 000 euros de chiffre d’affaires en 2024 avec un taux d’occupation de 65 %

A Fleur de Rance est classée en cinq étoiles et peut accueillir 36 convives. © 7Jours/Rolland
Enfin, en 2020, le couple a transformé sa propriété familiale en une résidence de tourisme haut de gamme baptisée A Fleur de Rance. Aménagée dans d’anciennes écuries, cette demeure de 600 m² accueille la clientèle d’affaires, des familles ou des voyageurs de passage. L’activité, gérée par Johanne Lebel, a dégagé près de 500 000 euros de chiffre d’affaires l’an dernier, avec un taux d’occupation de 65 %. « Nous pensions y vivre, puis la crise sanitaire nous a fait changer de cap. L’idée a émergé sur un coup de tête, entre deux coups de tractopelle », sourit Pierre-Yves Lebel.
Une santé retrouvée
Sous la houlette de Lebel Ensemble, les quatre entités affichent une santé retrouvée et un chiffre d’affaires consolidé de 5,3 millions d’euros en 2024. « Nous avons réussi à équilibrer les activités : un peu moins ici, un peu plus là, mais le tout est stable », se félicite le chef d’entreprise. Le groupe emploie aujourd’hui 35 salariés, dont une large majorité dans l’atelier. La fidélité des équipes constitue un pilier de la réussite du fondateur, avec la moitié des salariés en poste depuis plus de quinze ans.
Longtemps, Pierre-Yves Lebel a tout réinjecté dans ses entreprises, refusant de se verser le moindre dividende. « Aujourd’hui, j’en prends un peu », glisse-t-il sans détour. Son modèle reste néanmoins fondé sur l’autofinancement avec une gouvernance resserrée et une indépendance farouche. Lui qui affirme n’avoir jamais considéré que ses entreprises lui appartenaient espère les transmettre, à terme, à ses collaborateurs.
À Fleur de Rance, l’hospitalité selon Lebel

A Fleur de Rance est composée de cinq appartements et d’espaces communs. © 7Jours/Rolland
À Saint-Malo, dans un ancien corps d’écurie, Pierre-Yves et Johan Lebel ont imaginé une résidence de tourisme haut de gamme à l’empreinte carbone réduite. Baptisée A Fleur de Rance, la propriété de 600 m² propose cinq appartements indépendants, une salle de réception modulable, un sauna, un hammam et une piscine intérieure extérieure de 13,5 m de long, chauffée toute l’année à 30 °C. L’ensemble peut accueillir jusqu’à 36 personnes. Ce projet, dont l’investissement atteint 3 millions d’euros environ, a été pensé comme un démonstrateur d’efficacité énergétique. La chaleur de la piscine est recyclée via un système de déshumidification par condensation en circuit fermé qui permet de couvrir 70 % des besoins thermiques du bâtiment en hiver.

Une piscine intérieure extérieure de 13,5 m de long est accessible toute l’année. © 7Jours/Rolland
Une cuve enterrée de 25 000 litres permet la récupération et la réutilisation des eaux pluviales pour les usages domestiques. Une installation solaire doit prochainement compléter le dispositif, avec pour ambition d’atteindre un taux d’autoconsommation de 100 %. C’est Johanne Lebel qui assure l’exploitation des lieux au quotidien. Les réservations s’opèrent via des différents canaux : 60 % en direct, 40 % via des plateformes spécialisées. Classée 5 étoiles, elle a été distinguée par une Étoile du Tourisme décernée par la Ville de Saint-Malo.