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Attribution gratuite d’actions aux salariés

La Banque de France indique, dans son bulletin de mars-avril 2023, que les difficultés de recrutement de salariés progressent pour les entreprises françaises : 52 % déclarent rencontrer des difficultés de recrutement en mai 2023, contre 36 % en mai 2021. Pour se montrer attractives et fidéliser leurs collaborateurs, les entreprises s’adaptent et font évoluer leur offre d’embauche. Ainsi, Total a proposé, le 29 mars 2024, au conseil d’administration, d’attribuer cent actions de la société à chaque salarié de l’entreprise, sous condition de présence de cinq ans. Cette « Attribution gratuite d'actions "AGA", au profit des salariés, permet de les intéresser aux résultats de l’entreprise et de les récompenser par l’octroi d’une rémunération. Éléments de décryptage.

Rémi Bregeon et Emma Bourlès, du pôle Édito du master 1 DJCE de Rennes ; Me Valérie Tazé avocate au barreau de Nantes et Me Marie Chainay avocate au barreau de Rennes 

Rémi Bregeon et Emma Bourlès, du pôle Édito du master 1 DJCE de Rennes ; Me Valérie Tazé avocate au barreau de Nantes et Me Marie Chainay avocate au barreau de Rennes  ©7J_LM

La loi n° 2023-1107 du 29 novembre 2023, relative au partage de la valeur, est venue transposer l’accord national interprofessionnel relatif au partage de la valeur au sein de l’entreprise conclu en février 2023, avec pour objectif de développer et de faciliter l’actionnariat salarié. Comme le souligne le rapport de la Commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale en date du 20 juin 2023 sur le projet de loi, force est de constater que, jusqu’alors, l’utilisation du mécanisme de l’action gratuite, introduit en France par la loi n° 2004-1484 du 30 décembre 2004 de finances pour 2005, ne concernait qu’un très faible pourcentage des salariés en France, et se concentrait principalement dans les grandes entreprises et sociétés cotées. La loi relative au partage de la valeur s’adresse directement aux entreprises plus modestes, en proposant un assouplissement notable du mécanisme, visant à inciter les petites et moyennes entreprises à développer cette pratique.

Les actions gratuites ne sont pas le seul outil d’incitation à la fidélisation des salariés de l’entreprise via l’accès au capital social existant dans le corpus juridique français : les employeurs peuvent notamment avoir également recours aux bons de souscription de parts de créateur d’entreprise (BSPCE) ou encore aux stock-options.

Le cadre juridique de l’AGA

L’émission d’actions gratuites est encadrée par les articles L.225-197-1 à L.225-197-5 du Code de commerce. Un dispositif ouvert uniquement aux sociétés par actions (SA, SAS et SCA), ce qui restreint de facto son champ d’application. La décision est prise en assemblée générale extraordinaire des associés, statuant sur les conditions de l’émission : bénéficiaires de l’attribution, pourcentage maximum du capital concerné, et délai au terme duquel l’attribution devient définitive (période d’acquisition) et au terme duquel les actions attribuées gratuitement pourront être cédées (période de conservation). Les AGA ont déjà fait l’objet de modifications profondes par la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 dite loi Macron, depuis laquelle seule une période minimale d’acquisition d’un an s’impose, sous réserve que la durée cumulée des périodes d’acquisition et de conservation atteigne au moins deux ans.

 

  • Les bénéficiaires : l’AGA est ouverte à un cercle de souscripteurs assez large, puisqu’elle peut concerner les salariés de l’entreprise, ou seulement certaines catégories de salariés (sous réserve d’identification par des critères objectifs : ancienneté, fonction, etc.), ou encore certains mandataires sociaux, que le Code de commerce désigne limitativement : “le président du conseil d’administration, le directeur général, les directeurs généraux délégués, les membres du directoire, ou le gérant d’une SCA”. Sont uniquement exclus…

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