Les deux amis Jérôme Permingeat et Sylvain Flet ont uni leur force, en 2018, avec un troisième investisseur, pour devenir associés de Le Minor, une marque bretonne qui se distingue par son engagement à préserver et valoriser le savoir-faire local. « Nous fabriquons des produits (pulls, marinières, manteaux…) 100 % made in France. Notre objectif est de maintenir toute la production sur le territoire et de pérenniser ce patrimoine unique », explique Sylvain Flet.
Le Minor annonce être « la dernière bonneterie bretonne encore en activité », fierté des chefs d’entreprise pour cette marque qui n’a jamais délocalisé sa production, même lorsque c’était la tendance. « Avant 2012, le Made in France n’était pas une priorité dans le secteur textile. Nous bénéficions des choix courageux de nos prédécesseurs. »
Ambitions de croissance et défis contemporains
Et les chiffres déjouent les pronostics, le made in France ne serait pas une utopie : depuis 2018, le chiffre d’affaires de l’entreprise est passé de 1,6 million à 4 millions d’euros, une croissance impressionnante malgré un contexte économique difficile. En effet, historiquement dépendante du marché japonais (80 % du chiffre d’affaires en 2018), la marque a amorcé un pivot pour renforcer sa présence en France. « Nous avons atteint un équilibre avec 45 % de nos ventes en France et 55 % au Japon. C’est tout de même un paradoxe amusant de savoir que Le Minor est connue comme une marque de luxe là-bas alors qu’elle n’est pas connue de tout le monde à Lorient », sourit Sylvain Flet. Aujourd’hui la marque vend en ligne et dans deux points de vente à Guidel et Paris, et ne compte pas s’arrêter là : elle souhaite se positionner sur le marché des marques d’héritage comme Barbour et Paraboots. « Nous voulons proposer des vêtements de qualité, durables et indémodables. » La marque cible également une clientèle plus jeune et plus urbaine à la recherche de pièces très qualitatives.
On le sait peu, mais Le Minor a été façonnier pour de grandes marques de luxe : « La marque a fabriqué des manteaux pour Chanel, Dior, Ted Lapidus ou Courrèges, il y a des archives absolument incroyables », s’enthousiasme-t-il. Plus récemment, Le Minor a aussi travaillé pour des marques prémium comme Balibaris, Sézane ou Octobre édition.
Défis de production
L’entreprise bretonne doit relever de nombreux défis notamment liés à la perte de savoir-faire dans le textile : « Il n’y a plus qu’un seul fournisseur de coton filé en France, c’est assez limitant, relève Sylvain Flet. Nous avons pu bénéficier d’une subvention de 400 000 euros dans le cadre du projet France relance et au titre de la réindustrialisation du territoire. Nous avons embauché quinze personnes et investi dans de nouvelles machines à coudre et une machine à tricoter. »
Face à la disparition des écoles de tricotage, Le Minor forme en interne ses salariés et attire de nouveaux candidats en quête de sens au travail. L’entreprise se positionne comme un gardien du savoir-faire textile français. « On observe une prise de conscience des consommateurs. Mais les gens se trompent s’ils pensent qu’on peut faire du made in France accessible : c’est impossible, on ne serait pas compétitif. Mais c’est tant mieux, cela veut dire qu’on rémunère correctement nos salariés. »