Quand vous avez pris la tête de vos entreprises, projetiez-vous des transformations ou l’avez-vous vécu dans une continuité ?
Manon Daher. Le secteur automobile, de toute façon, est en pleine transformation, ne serait-ce que par les évolutions technologiques, les évolutions d’usage ou la pression réglementaire. Il n’y a rien eu à imposer par rapport à un modèle traditionnel. Nous avions le soutien de nos actionnaires qui partageait ce sentiment d’urgence à se réinventer.

Manon Daher, directrice générale adjointe Groupe Bodemer © 7Jours/Didier Echelard
Thibault Pigeon. Cela s’est fait naturellement. Nous devions évoluer. Ce n’est pas propre à ma génération. Je représente la quatrième génération de ma famille à la tête de l’entreprise (Manon Daher et Thibaud Carissimo également, ndlr). Les générations précédentes ont su s’adapter aussi. Certes, le climat est peut-être un peu plus mouvementé pour nous, d’un point de vue environnemental, sociétal et autre. Toutes ces thématiques s’imposent à nous, mais pas dans une contrainte insurmontable.
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Groupe Bodemer
Siège social : Saint-Brieuc (22)
Chiffre d’affaires : 1 milliard d’euros
Effectif : 1 850 collaborateurs
Date de création : 1923
Groupe Pigeon
Siège social : Argentré du Plessis (35)
Chiffre d’affaires : 455 millions d’euros
Effectif : 2 000 collaborateurs
Date de création : 1929
Votre génération, façonnée par les crises successives, fait-elle face à un pilotage d’entreprise plus difficile qu’auparavant ?
Thibaud Carissimo. Nous avons commencé à travailler en pleine crise des subprimes (2008), puis tout s’est accéléré : digitalisation, transition climatique, pression réglementaire, et plus récemment, la fin de la mondialisation telle qu’on la connaissait. Je crois que c’est une force : n’ayant connu que l’incertitude, nous ne sommes pas dans l’attente d’un retour à la normale. Pas de nostalgie des beaux temps passés, juste l’adaptation permanente.
« Pas de nostalgie des beaux temps passés, juste l’adaptation permanente. » – Thibaud Carissimo
Quelles sont les transformations majeures dans vos secteurs ?
Th. Pi. Pour un groupe entreprenant dans les travaux publics, c’est la prise en compte des enjeux environnementaux. La production de matériaux à plus faible impact environnemental, d’origine recyclée par exemple, sur lequel travaille notre pôle recherche et développement. Nous imaginons le territoire de demain, qui prend en compte l’évolution du climat, avec des îlots de chaleur urbains et de nouvelles mobilités.
M. Da. Pour nous, le gros facteur de transformation sont les obligations réglementaires. Nous allons vers l’électrique à marche forcée même si l’attrait des Français vers le tout électrique est discutable. Cela transforme notre chaîne de valeurs, impactant aussi bien nos ressources humaines que la rentabilité. Sur un véhicule électrique, la rentabilité n’est pas la même que sur un véhicule thermique. Nous devons travailler sur la diminution de nos charges fixes, qui sera un des vrais leviers.
Face à tous ces enjeux, comment vous faites-vous conseiller ? Tout se passe en famille ou essayez-vous de vous entourer de gens extérieurs ?
M. Da. Pour une ETI de notre taille, nous avons énormément structuré notre gouvernance. Nous disposons de trois comités qui nous épaulent dans nos décisions : un comité organisation et rémunération, un comité audit et risque et un comité stratégique. Au sein de ces comités interviennent des administrateurs familiaux et indépendants. Nous avons intégré…