Le législateur a créé ce CJPM, avec comme objectifs notamment de simplifier la procédure, de limiter les délais entre l’infraction poursuivie et la première réponse judiciaire – portant exclusivement sur la question de la culpabilité, en consacrant un principe de « césure du procès pénal ». Objectifs aussi honorables que nécessaires, mais susceptibles de porter atteinte au respect des droits les plus fondamentaux du mineur mis en cause, parfois influençable compte tenu de son âge et de son manque d’expérience face à l’institution judiciaire.
L’assistance de l’avocat
Le législateur, poursuivant ces objectifs avec comme « boussole » l’intérêt supérieur de l’enfant, a ainsi rendu la présence de l’avocat obligatoire pour l’ensemble des auditions concernant un mineur mis en cause. Si c’était déjà le cas lors de garde à vue, à présent les auditions libres sont soumises au même régime.
Ces auditions libres sont très régulièrement utilisées dans le cadre d’enquêtes préliminaires, réalisées sous l’autorité du procureur de la République, représentant les intérêts de la société et soutenant l’accusation devant les juridictions répressives. C’est lui qui détermine le cadre dans lequel sont recueillies les déclarations de la personne mise en cause, et qui indique aux services d’enquêtes s’il convient de placer un mineur en gardes à vue, ou si une convocation à se présenter au service pour une audition libre – régime a priori moins contraignant, paraît plus opportune.
L’Ordonnance de 1945 prévoyait que le mineur convoqué dans le cadre d’une audition libre devait être informé de son droit d’être assisté d’un avocat. Comme le précise actuellement le CJPM : « Lorsque le mineur, ou ses représentants légaux, n’a pas sollicité la désignation d’un avocat, le Procureur de la République (…) en informe par tout moyen et sans délai le Bâtonnier afin qu’il en commette un. »
Une approche qui semblait soucieuse de la préservation des intérêts du mineur, afin de ne pas être livré à lui-même et être accompagné d’une personne capable de lui expliquer les aspects procéduraux, de le conseiller sur la position à adopter en fonction de sa situation. Cette disposition essentielle était néanmoins assortie d’une exception qui la vidait de son sens.
En effet, l’Ordonnance de 1945, comme l’article L.412-2 du CJPM avant sa modification, prévoyaient une limite à ce principe et permettaient au Procureur de la République de ne pas solliciter la désignation d’un avocat auprès du Bâtonnier lorsqu’il était estimé que « l’assistance d’un avocat n’apparaît pas proportionnée au regard des circonstances de l’espèce, de la gravité de l’infraction, de la complexité de l’affaire et des mesures susceptibles d’être adoptées en rapport avec celle-ci ».
Qui pouvait se satisfaire de cette situation, dans laquelle le Ministère Public, était ainsi juge et partie, décidant de l’opportunité de permettre ou non à la personne qu’il met en cause d’exercer de son droit le plus essentiel à être assistée d’un avocat.
Donner à l’attaquant d’une équipe de football la possibilité de choisir si son adversaire jouera avec ou sans défenseur ne semble pas être la meilleure traduction du principe d’égalité des armes, même si cet attaquant fait preuve d’une intégrité remarquable.
Fort de ce constat, le législateur a donc supprimé la possibilité de déroger, y compris à titre exceptionnel, à l’assistance du mineur par un avocat dans le cadre de l’audition libre . La présence de l’avocat est donc désormais obligatoire à tous les stades de la procédure, pour l’ensemble des auditions…