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Depuis Rennes, Bernard Cazeneuve déplore une « Europe qui bâtit des politiques organisant son déclin »

Lors de son intervention à la plénière du think tank Le Breizh Lab des Progressistes bretons à Rennes (35), Bernard Cazeneuve, ancien Premier ministre socialiste, a dressé un constat sévère sur les politiques européennes en matière économique.

Invité par Jean-Yves Le Drian, président du Breizh Lab et ancien ministre sous François Hollande et Emmanuel Macron, Bernard Cazeneuve, ancien ministre de l’Intérieur et Premier ministre sous le quinquennat Hollande, était à Rennes ce samedi 25 janvier 2025

Invité par Jean-Yves Le Drian, président du Breizh Lab et ancien ministre sous François Hollande et Emmanuel Macron, Bernard Cazeneuve, ancien ministre de l’Intérieur et Premier ministre sous le quinquennat Hollande, était à Rennes ce samedi 25 janvier 2025 ©7Jours/Bruneau

Invité par Jean-Yves Le Drian, président du Breizh Lab et ancien ministre sous François Hollande et Emmanuel Macron, Bernard Cazeneuve, ancien ministre de l’Intérieur et Premier ministre sous le quinquennat Hollande, a abordé les défis économiques, industriels et géopolitiques auxquels l’Europe est confrontée, dans un contexte mondial en pleine mutation.

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L’Europe, « architecte de son propre déclin »

Bernard Cazeneuve a dénoncé « la capacité de l’Europe à bâtir des politiques qui organisent son propre déclin ». Il a pointé du doigt la multiplication des normes, citant notamment la CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive) et la CS3D (Corporate Sustainability Due Diligence Directive). Ces directives, selon lui, s’apparentent à une « machine normative démente » qui impose « plus de contraintes bureaucratiques, sans pour autant garantir plus de développement durable ».

Bernard Cazeneuve a dénoncé « la capacité de l’Europe à bâtir des politiques qui organisent son propre déclin » ©7Jours/Bruneau

Le socialiste a souligné un écart de compétitivité alarmant : « Alors que les Chinois fabriquent des véhicules électriques entre 15 et 20 % moins chers que les Européens, nous construisons des gigafactories sans savoir faire de séparateurs. » Dans un contexte où l’industrie automobile européenne est sous pression, il s’est inquiété de « la saignée à venir dans les prochaines semaines ».

La ministre déléguée chargée de la Ruralité, Françoise Gatel, était venue écouter Bernard Cazeneuve

La ministre déléguée chargée de la Ruralité, Françoise Gatel, était venue écouter Bernard Cazeneuve ©7Jours/Bruneau

Face aux géants : « On se laisse dépecer »

L’ancien Premier ministre a également critiqué une forme d’impuissance européenne face à la domination américaine et chinoise. Il a évoqué l’utilisation stratégique par les États-Unis du Foreign Corrupt Practices Act (FCPA) pour défendre leurs intérêts commerciaux, rappelant l’exemple d’Alstom. « Avant son rachat par General Electric, Alstom avait fait l’objet d’une enquête américaine ».

« Soit on corrige, soit on disparaît. »- Bernard Cazeneuve, ancien Premier ministre socialiste.

L’homme politique a également regretté l’affaiblissement des institutions internationales : « Il n’y a plus d’Organisation mondiale du commerce (OMC), puisque l’institution est bloquée en raison de l’absence de nomination des représentants américains. »

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Manque de vision stratégique en Europe

Bernard Cazeneuve a mis en lumière les failles européennes en matière de soutien à l’industrie stratégique : « Quand, en Europe, une industrie stratégique a besoin d’un soutien public, la Commission dit non », prenant pour exemple la fusion avortée entre Siemens et Alstom – qui ambitionnaient de créer un géant du ferroviaire – jugée non conforme par Bruxelles en 2019.

Marie-Pierre Vedrenne, députée européenne Renaissance et élue au Conseil régional de Bretagne, était présente à la plénière

Marie-Pierre Vedrenne, députée européenne Renaissance et élue au Conseil régional de Bretagne, était présente à la plénière ©7Jours/Bruneau

Autre problème de fond soulevé par celui qui fût un temps pressenti pour être de nouveau Premier ministre : « Nous ne sommes pas capables d’orienter l’épargne vers nos objectifs stratégiques, la transition écologique, l’intelligence artificielle. » Et de poursuivre : « Les États-Unis et les Chinois menacent nos industries et notre compétitivité. Soit on corrige, soit on disparaît. »

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