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La Bretagne cultive son terroir viticole et s’envole vers une IGP Bio

Réchauffement climatique, libéralisation européenne et passion des vignerons : la Bretagne revendique son rang parmi les régions viticoles avec un projet ambitieux d’IGP bio. Une démarche soutenue par la région et portée par deux associations dédiées.

Les vignerons impliqués dans la démarche aux côtés d'Arnaud Lecuyer, vice-président Agriculture, agroalimentaire et alimentation de la Région Bretagne

Les vignerons impliqués dans la démarche aux côtés d'Arnaud Lecuyer, vice-président Agriculture, agroalimentaire et alimentation de la Région Bretagne ©MR7Jours

La Bretagne, terre d’élevage parmi d’autres activités agricoles, pourrait bientôt être reconnue comme une nouvelle région viticole. Le 19 décembre 2024, à Rennes (35), les acteurs de la filière ont officiellement lancé le projet d’Indication géographique protégée (IGP) bio des vins de Bretagne.

Ce label, un précieux sésame pour valoriser les particularités d’un terroir et en assurer la promotion, pourrait devenir la pierre angulaire d’une filière en construction depuis l’ouverture des droits de plantation en 2016. Soutenue par la région Bretagne, cette initiative vise à inscrire la viticulture bretonne dans une démarche qualitative et durable.

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Une filière en pleine effervescence

Pas si anecdotique, le vin breton compte déjà près de 150 hectares cultivés, répartis sur les quatre départements de la Bretagne administrative. Avec une production estimée à 50 000 bouteilles en 2024, la quarantaine de vigneronnes et vignerons de la région poursuit ses efforts. Les prochaines campagnes devraient permettre d’atteindre le million de cols d’ici à 2030.

« Nos effectifs ont quadruplé en trois ans et les plantations récentes laissent augurer une croissance continue » – Julien Lefèvre, coprésident de l’Association des vignerons bretons (AVB).

Cette effervescence repose sur des terroirs propices, dominés par des sols schisteux et granitiques ; idéaux pour des cépages tels que le chardonnay, le pinot noir et le chenin. Par ailleurs, les pratiques biologiques se sont naturellement imposées : 100 % des exploitations adhérentes à l’AVB sont certifiées ou en cours de conversion bio.

Les vignes de Saint-Goustan représentent 2,5 ha de vignes plantées par le vigneron Aurélien Berthou dans le Morbihan (56)

Les vignes de Saint-Goustan représentent 2,5 ha de vignes plantées par le vigneron Aurélien Berthou dans le Morbihan (56) ©DR

Romain Le Guillou, président de l’Association pour la valorisation des vins de Bretagne (AVVB), rappelle les enjeux d’une IGP : « Aujourd’hui, nous sommes limités à la mention ‘Vins de France’. Une IGP permettrait de revendiquer pleinement notre ancrage breton tout en offrant un gage de transparence et de qualité pour le consommateur. »

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La région en renfort

L’obtention de ce label relève du temps long : au moins cinq ans sont nécessaires pour compléter le dossier et finaliser les derniers ajustements aux côtés de l’Inao, l’organisme référant.

La région Bretagne a déjà mobilisé plusieurs dispositifs pour structurer et soutenir cette jeune filière. Parmi eux, des aides financières comme la Dotation jeune agriculteur de 22 000 euros ou le dispositif AGRI Viti, qui finance 40 % des investissements pour les exploitations biologiques, dans la limite de 150 000 euros. La formation n’est pas en reste : le lycée Kerplouz d’Auray (56) propose, depuis 2021, des cursus spécialisés en viticulture.

« La viticulture est encore marginale en Bretagne, mais elle représente une vraie opportunité économique et environnementale. »

« Avec 150 hectares, la viticulture est encore marginale en Bretagne, mais elle représente une vraie opportunité économique et environnementale, estime Arnaud Lecuyer, vice-président Agriculture, agroalimentaire et alimentation, à la Région. Nous souhaitons faire de la Bretagne une région exemplaire en la matière, avec des pratiques respectueuses du vivant et des territoires. »

Les terres viticoles n’ont pas vocation à concurrencer celles destinées aux grandes cultures ou à l’élevage, mais elles apportent une diversité bienvenue dans un contexte climatique et économique en franche mutation.

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Un projet porteur d’avenir

Si la structuration de la filière est récente, les acteurs locaux se projettent vers l’avenir. En parallèle de ses engagements environnementaux, la filière souhaite valoriser l’humain et les savoir-faire locaux. La création de l’IGP reposera sur un cahier des charges exigeant qui inclura ainsi « des pratiques agricoles durables et un engagement sociétal envers les travailleurs. » Alors que les démarches officielles sont lancées, l’avenir s’annonce prometteur.

La Bretagne pourrait bientôt rejoindre le cercle des régions viticoles, avec le lot de perspectives économiques qu’apporte cette reconnaissance.

Outre le rayonnement régional, les vins bretons ambitionnent une valorisation nationale et internationale. La montée en puissance de la production va se traduire par une diversification des débouchés. Aujourd’hui centrée sur la vente en direct et les cavistes, la distribution devrait s’étendre à la GMS à moyen terme. En parallèle, des efforts sont menés pour promouvoir ces vins sur les grandes tables bretonnes.