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Famille : Préparer l’avenir pour protéger ceux qu’on aime

La crise de la Covid-19 a développé le désir de protéger sa famille et son patrimoine chez les Français selon une étude d'Harris Interactive pour les Notaires de France. Mais dans une société en constante mutation où de nouveaux modèles familiaux s’imposent (famille monoparentale, recomposée, union libre…), le droit de la famille est là pour vous aider à anticiper l’avenir, bien qu’il peut parfois s’avérer complexe. Alors, comment maîtriser la transmission de votre patrimoine et sécuriser les situations en faveur de ceux que vous aimez ? Maître Denis Renaudon-Brunetière, notaire à la Chambre des notaires d'Ille-et-Vilaine vous explique.

Me Denis Renaudon

Me Denis Renaudon - notaire à la Chambre d’Ille-et-Vilaine ©D. R.

Succession : pourquoi l’anticiper ?

La transmission de votre patrimoine peut intervenir de deux façons :

  • en anticipant de votre vivant en procédant à des donations,
  • lors de la succession au moment de votre décès, ce sont vos enfants qui héritent.

Si l’on se réfère aux chiffres de l’Insee, la moitié des enfants naissent hors mariage et un enfant sur trois vit dans une famille monoparentale ou recomposée. Ces nouveaux schémas nécessitent de bien comprendre ses droits pour préparer sa succession et éviter ainsi des conflits familiaux.

Pour mieux protéger votre conjoint, rétablir l’équité auprès de vos enfants, ou encore donner à vos beaux-enfants, des solutions existent. Pour ce faire, un seul mot d’ordre : l’anticipation !

Parmi les choix qui s’offrent à vous, la donation vous permet de limiter les problèmes entre vos héritiers. Elle confère également de nombreux avantages tels que :

  • la possibilité d’organiser la répartition de votre patrimoine en tenant compte de la situation de vos enfants et des affinités,
  • éviter une indivision post-successorale,
  • garder le contrôle sur la jouissance de votre bien jusqu’à votre décès (donation de la nue-propriété de biens),
  • limiter la note fiscale

Union libre, Pacs ou mariage : un choix aux conséquences majeures

En France, c’est l’Union libre qui est préférée par plus de la moitié des couples. Le mariage est délaissé souvent par crainte de devoir supporter le coût d’un divorce et une lourde procédure. Le Pacs en revanche, bat de nouveaux records chaque année. Pourtant, le Pacs ou a fortiori l’union libre, ne vous apportera pas les mêmes droits et la même protection qu’un mariage.

En effet, si le Pacs équivaut au mariage sur le plan des impôts, la différence entre les deux régimes juridiques est importante quand l’un des membres du couple disparaît. Le mariage rend les conjoints héritiers l’un de l’autre, tandis que le Pacs fait l’impasse sur la succession, à moins de l’écrire dans la convention de Pacs ou bien dans un testament.

De plus, au regard de la protection sociale, il ouvre droit à une pension de réversion, c’est-à-dire, une part de la retraite du défunt.

Par exemple, un jeune couple pacsé achète sa résidence principale. Leurs parents sont tous en vie. Si l’un des deux membres du couple décède, la part de la maison acquise par le défunt revient aux beaux-parents du survivant (et éventuellement à ses frères et sœurs). Si ce n’est pas souhaité, il est de rigueur d’organiser en amont la transmission de votre patrimoine.

Le couple en chiffres :

  • 1 mariage sur 5 célébré́ en 2000 était rompu 10 ans plus tard, 29 % au bout de 15 ans, (source Insee, TEF 2019)
  • Depuis 1999, 1 pacs sur 4 a été dissous,
  • 58 % des ménages possèdent un bien immobilier,
  • 14,8 % ont des actifs professionnels.

Autre exemple, si vous n’êtes pas mariés, vous ne vous devez rien mutuellement. Votre compagnon peut rompre après vingt ans de vie commune sans vous laisser un centime. Pourtant, le divorce, bien qu’il soit réputé long et compliqué, vous protège puisqu’il permet de déterminer des engagements qui vont protéger chacun des ex-époux pour le long terme.

Un seul mot d’ordre : l’anticipation !

Héritage : quels sont vos droits ?

En l’absence de donation ou de testament, la loi désigne les héritiers et fixe leur quote-part – part qui revient à chacun – dans la succession. Si rien n’a été anticipé, les successions peuvent s’avérer complexes et devenir source de conflits, particulièrement dans les familles recomposées.

Pour vous y retrouver, prenons l’exemple d’un cas concret :

Votre conjoint, partenaire ou concubin décède en laissant des enfants d’une première union. Vous étiez propriétaires de votre maison à 50/50. Vos droits sur ce bien diffèrent selon votre situation matrimoniale :

  • Concubin(e) vous restez propriétaire de votre moitié de maison, mais vous n’héritez de rien dans la L’autre moitié revient aux enfants de votre concubin (à égalité entre les enfants de la première union et ceux que vous avez eus ensemble). La maison est désormais en indivision avec ces derniers. Ils pourraient réclamer leur part, et à défaut d’accord, demander la vente forcée du bien au juge.
  • Pacsé(e), vous êtes dans la même situation que des concubins, à défaut de testament, vous n’êtes pas héritiers l’un de l’autre. Vous bénéficiez, toutefois, automatiquement d’un droit de jouissance d’un an sur le logement commun.
  • Marié(e), la loi prévoit que vous recevrez ¼ en pleine propriété de la succession, le reste se partageant entre les enfants du conjoint, communs ou non. Pour le logement, vous recevez également le droit l’occuper jusqu’à votre propre décès. À votre mort, le droit viager s’éteint, mais la part que vous avez reçue dans la succession de votre conjoint sera transmise à vos propres héritiers. Cela peut donc créer des inégalités entre les enfants de lits différents, mais également entre ceux-ci et les enfants communs s’il y en a.

Si un testament a été rédigé, vous pouvez en décider autrement.

La question à Maître Renaudon-Brunetière :

« Je me suis remariée avec un homme qui a des enfants d’une précédente union. Je m’entends très mal avec eux. Si je venais à disparaître avant lui, je souhaite qu’il continue à vivre dans ma maison mais je ne voudrais pas que ses enfants en héritent un jour. Comment faire ? »

Cette interrogation est devenue fréquente dans les études notariales. La réponse dépend de plusieurs éléments. D’une part, votre époux a un droit d’usage (ou la jouissance gratuite) du logement et des meubles meublants, pendant l’année qui suit votre décès. Il disposera également d’un droit viager d’habitation et un droit d’usage sur le mobilier. Votre époux pourra donc continuer à vivre dans la maison.

Si vous avez-vous-même des héritiers d’une première union, alors ceux-ci toucheront leur part au titre de la réserve héréditaire, et votre mari obtiendra 25 %. Quand il décèdera à son tour, ses propres enfants seront alors propriétaires d’un quart de votre patrimoine. Il existe donc une probabilité que le scénario que vous ne souhaitez pas se réalise.

Il est toutefois possible de l’écarter, en rédigeant un testament qui attribue les 25 % du conjoint survivant aux propres enfants du défunt – cela supprime implicitement sa part. Par ailleurs, si vous avez des enfants en commun, alors votre mari devra faire un choix. Soit il reçoit 25 % des biens, soit il obtient l’usufruit de tout le patrimoine. Dans un testament, il est possible d’imposer l’une des deux options, voire de les supprimer.

Testament : un moyen de faire respecter vos volontés

Si vous ne souhaitez pas que votre succession soit régie par la loi, le testament vous permettra de modifier vos héritiers. Vous pouvez par exemple intégrer à votre succession vos petits-enfants, même si vos enfants sont encore en vie, ou encore votre concubin ou partenaire de PACS.

Vous êtes cependant tenu de réserver une partie de votre patrimoine à vos descendants. Il s’agit des règles relatives à la réserve héréditaire. Ces héritiers, qui sont souvent les enfants ou, en l’absence d’enfants, votre conjoint, ne peuvent donc pas être déshérités et reçoivent une part minimale. La part restante peut être attribuée librement dans votre testament.

Par ailleurs, vous pouvez aussi léguer la totalité de votre patrimoine à vos héritiers désignés par la loi, tout en organisant vous-même précisément la répartition des biens entre eux. Vous pouvez notamment attribuer des biens à l’un de vos héritiers soit en pleine succession, soit en usufruit, c’est-à-dire, qu’il aura la jouissance légale du bien sans en avoir la propriété. Attention à bien respecter la part légale de succession due à chacun et à prendre en compte les donations faites antérieurement à vos enfants. En effet, les héritiers ayant reçu des donations du vivant du donateur devront rapporter l’objet de la donation à la succession. Il ne devra pas rendre le bien, mais son montant sera pris en compte au moment du partage de la succession et déduit de la part de cet héritier.

 

Le conseil de Maître Renaudon-Brunetière :

Pensez à adapter votre testament en fonction des changements de votre vie ! Il est possible de modifier votre testament, par un nouveau testament ou par un codicille, ou de le faire disparaître. Votre testament reste valable tant que vous n’avez pas exprimé de volonté contraire.

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