« Nous vous avons choisi pour votre combat quotidien en tant qu’avocat depuis vos débuts : la liberté d’expression. » C’est avec ces mots, lourds de sens, que les élèves de l’École des avocats du Grand Ouest (Edago) ont accueilli le célèbre avocat Richard Malka. Souriant, toujours, « cela me permet de mieux faire passer les paroles acerbes ». Connu médiatiquement par des affaires tristement célèbres comme celle de l’attentat de Charlie Hebdo, Richard Malka n’a pas manqué de conseils pour les étudiants avides de connaissances sur cette profession exigeante.
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Être avocat, c’est faire de la politique ?
Même si certaines des affaires sur lesquelles a travaillé Richard Malka sont liées de près ou de loin à cet univers, pour l’avocat, « la profession n’est pas politique. Être avocat, c’est être engagé pour l’État de droit », évoque l’avocat, tout en précisant : « Aujourd’hui, tout le monde a peur de ce qu’il dit. En tant qu’avocats, nous possédons un droit fondamental, celui de pouvoir tout dire. Dans un moment où la liberté d’expression est menacée, c’est un privilège. Cela sera le plus grand combat des nouveaux avocats dans les années à venir. »

Adeline Clémençon-Levrel, Richard Malka et David Gorand, lors de l’accueil du célèbre avocat par les étudiants de l’Edago ©S.Se7Jours
Le cas des réseaux sociaux
Avec les réseaux sociaux est arrivé un problème imprévisible : le « trop » de liberté d’expression. Comment protéger la liberté d’expression dans un univers où l’on peut dire « n’importe quoi » ? « C’est compliqué car dans certains pays, c’est le dernier vecteur de liberté. Dans notre société, c’est plutôt un destructeur de liberté d’expression, qui se fait à travers des campagnes haineuses. » Un vecteur d’appauvrissement de débat pour l’avocat, qui précise que « la difficulté d’élaboration d’une loi au niveau européen rend la chose d’autant plus compliquée ». Un sujet en construction donc, qu’il restera aux futurs avocats à traiter.
Affaires difficiles ou non choisies
Dans toute carrière d’avocats, certaines affaires sont choisies, quand d’autres sont subies. L’avocat défenseur des droits de la presse ne regrette aucune de ses affaires. « Il y en a eu des plus difficiles que d’autres, notamment celle de Charlie Hebdo, pour laquelle je défendais des amis. La frontière entre avocat et proches était fine, cela ne doit jamais arriver. »
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Savoir s’exprimer à l’oral… Ou pas
Être un bon avocat passe par l’aisance à l’oral ? Faux pour celui qui est passé expert malgré lui en passages médiatiques à répétition. « Avant chaque prise de parole, je suis terrifié. Cela a toujours été un exercice pour lequel je ne suis pas du tout à l’aise, c’est plus une souffrance, surtout quand vous ajoutez à cela les médias et une grande audience… »
Au contraire, pour l’avocat, une trop grande aisance oratoire peut mener à des discours erronés. « Une belle plaidoirie, ce n’est pas l’aisance oratoire, c’est le sens de vos propos. » Dans des affaires compliquées, « quand nous portons sur nos épaules des femmes agressées, un père qui n’a plus le droit de voir ses enfants, un travailleur aux prud’hommes… Il faut savoir garder son sang-froid ».
« Je n’ai pas choisi ce métier »
« Je n’ai pas choisi d’être un avocat, je n’ai jamais voulu l’être et pourtant c’est la profession qui me correspondait le mieux. » Pour celui qui a fait un bac C (scientifique) et qui voulait être journaliste, l’avocature est arrivée par hasard. C’est lors d’un stage avec le célèbre avocat Georges Kiejman que la « passion est née. C’est un métier de liberté avant tout, que l’on ne doit pas exercer si l’on veut être aimé ».
Toujours sous protection de l’État, ce depuis le 8 janvier 2015, l’avocat, d’origine marocaine, qui n’a « aucune rancœur envers les religions » revendique toujours une liberté d’expression « primordiale pour la société, dans un contexte compliqué qui ne fait qu’accroître les difficultés de relations ».