Philippe Rouault, lorientais, a d’abord évolué dans le monde du tennis, avant de s’engager (suite à une blessure) dans celui des assurances, jusqu’à monter en 2016 son cabinet en conseil en gestion de patrimoine et protection sociale du dirigeant d’entreprise. Il a été président du CJD (sections de Lorient et de Bretagne), président du Medef 56 (2008 à 2011) et de commissions au Medef Bretagne. Il est élu en novembre 2021 président de la CCI Morbihan, avec la liste « Morbihan Ensemble ».
7 Jours : Quel bilan tirez-vous de ce début de mandat à la présidence de la CCI-56 ?
Philippe Rouault : 2022 était une année particulièrement intense. L’actualité ne nous a pas épargnés et nos ressortissants se posent beaucoup de questions. Mais avant de revenir sur le bilan de l’année, j’aimerais saluer la très forte motivation de l’équipe d’élus qui travaille à mes côtés, totalement engagée pour le territoire et souhaitant initier des actions à long terme. J’ai ainsi créé une nouvelle vice-présidence « Transition écologique et développement durable », confiée à Peter Nass, ingénieur et fondateur de la société Nass&Wind, spécialisée dans l’éolien. Il possède toutes les compétences pour nous permettre d’avancer dans ce domaine. Mais il ne peut travailler seul et j’insiste beaucoup pour que l’équipe travaille de manière transversale et non en silo : le commerce, les services, l’industrie, le tourisme, la transformation digitale et le développement durable, ont des dynamiques indissociables les unes des autres.
7J : Les entreprises se retrouvent impactées par des restrictions inédites, l’eau, le gaz, l’énergie…
PR : En effet, concernant la question de l’eau, cela s’est imposé de manière assez brutale, avec notamment la sécheresse estivale. Avec le programme Ecod’O engagé dès 2019 auprès d’entreprises du Morbihan et aujourd’hui déployé sur la Bretagne, les résultats sont indéniables : nous visions 8% d’économie d’eau, ils en ont réalisé entre 12 et 15 %. Ces efforts ont même permis à certaines entreprises de conserver une activité pleine durant la sécheresse, car elles n’étaient pas soumises à l’obligation de réduire leur production de 25%, ce fut le cas par exemple à la conserverie Groix & Nature.
7J : La guerre en Ukraine a ajouté la question de l’énergie.
PR : Nous avons commencé à travailler sur l’énergie dès le début du mandat. Le déclenchement de la guerre en Ukraine n’a fait « que » nous rappeler que la sobriété, le mix énergétique, nos empreintes carbone, etc. sont des préoccupations dont nous devons absolument nous emparer.
Nous avons donc porté le programme Eco’Carbone avec nos partenaires, la préfecture du Morbihan, l’Adème, le Conseil régional et Morbihan Énergies. Un programme d’ économies d’énergie, même si ce n’est pas la seule réponse à la crise énergétique, c’est un travail à long terme.
7J : Il y a de nombreuses conséquences sur notre économie, mais quel rôle peut jouer une CCI territoriale ?
PR : Seuls, notre action serait réduite à sa plus simple expression et n’aurait certainement que trop peu de répercussions. Nous avons donc décidé de créer une « task force énergie » dont le rôle est à la fois de sensibiliser tout l’écosystème aux pénuries et à la hausse des coûts de l’énergie, mais aussi de transmettre de manière concrète les bonnes pratiques des uns et des autres. Mais agir au niveau local ne suffit pas. Le 20 décembre dernier nous avons réuni les 6 députés et les 3 sénateurs du département pour les informer de nos ambitions et pour avoir leur indispensable soutien. Ils se sont montrés très concernés.
En ayant reçu le trophée Ecod’O des mains de la secrétaire d’État à la transition écologique quelques semaines auparavant, nous avions une certaine légitimité à aborder ce sujet. Nous leur avons présenté des cas concrets d’adaptation d’entreprises morbihanaises à la crise (Bret’s, Le Minor, Crêperie Lohéac). Nous avons également abordé le thème de la réutilisation des eaux traitées. Il faut faire bouger les choses ! La France surtranspose les lois européennes, ainsi certaines actions sont possibles en Belgique et pas en France…. À l’issue de cette réunion, nous avons adressé à la Première ministre un courrier conjoint, également signé par 13 agglomérations du département, demandant d’autoriser le Morbihan à devenir territoire d’expérimentation sur ce sujet.
7J : Quid de la santé économique du département?
PR : Je crois que nous vivons une période charnière, car le Morbihan est de plus en plus attractif. Et il faut accompagner cette transformation. C’est la raison pour laquelle je participe à un groupe de travail régional sur les reprises/transmissions. En tous cas, je suis bluffé par la quantité de « matière grise » qu’il y a et qui arrive sur notre territoire ! Souvent, des couples avec enfants, des grandes compétences et un fort pouvoir d’achat. Mais cette attractivité souligne nos lacunes en termes de logement…
Malgré cela, il faut souligner que tous les acteurs du Morbihan sont très soudés sur les sujets transversaux. Tous ont la volonté de faire avancer les choses et de pouvoir définir un horizon lointain. Au point que nous avons formé un groupe de travail « Morbihan 2030 » avec le Medef, la CPME 56 et nos trois chambres consulaires. Cela nous permettra de ne plus être happés par le quotidien !