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Béatrice Rivail, nouvelle présidente du Tribunal Judiciaire de Rennes

Elle aurait pu être psychiatre, mais finalement c’est la justice qui l’a emporté. Béatrice Rivail est attentive à la nature humaine, apprécie le rôle social de la justice et la réparation qu’elle peut apporter.

Philippe Astruc, procureur de la République et Béatrice Rivail, présidente du Tribunal judiciaire de Rennes

Philippe Astruc, procureur de la République et Béatrice Rivail, présidente du Tribunal judiciaire de Rennes ©Studio Carlito

Béatrice Rivail commence sa carrière en 1988 en tant qu’avocate puis en 2002 elle cède à un ancien désir de devenir magistrat. Une double expérience qui lui sert beaucoup aujourd’hui « J’entends tout à fait les difficultés des avocats, leurs besoins. Je sais aussi quelles sont les nôtres dans le monde de la magistrature. Ce double regard me permet de mieux comprendre ces deux mondes. »

Le faire ensemble

Béatrice Rivail arrive d’Ardèche. Elle y exerçait depuis 2017 en tant que présidente du tribunal de grande instance de Privas où elle a eu à cœur de développer la médiation notamment. Le faire ensemble est d’ailleurs un leitmotiv pour la nouvelle présidente du tribunal judiciaire de Rennes « Je crois en la dyarchie, à cette gouvernance à deux têtes, président et procureur, avec le directeur de greffe comme troisième homme. Pour que le tribunal soit bien géré, il faut être d’accord, prendre des décisions ensemble. Il faut savoir discuter, échanger, négocier. » Par ailleurs le management participatif fait partie intégrante de son vocabulaire « Nous ne sommes plus dans un management vertical avec les magistrats du siège, mais dans l’échange. »

Pour avoir une justice de proximité, il faut avoir les effectifs adaptés

À peine arrivée, Béatrice Rivail entre dans une phase de diagnostic pour prendre la mesure des besoins dans la juridiction. « On a eu une pléiade de réformes importantes qui se sont succédé. Il faut réadapter les effectifs à la taille et aux compétences de la juridiction. » On sent le sous-entendu : la juridiction a besoin de renforcer ses effectifs. « Pour avoir une justice de proximité, il faut avoir les effectifs adaptés afin qu’elle soit rapide et efficace. Toutes les procédures orales, où les gens saisissent le juge assez facilement (baux d’habitation, crédit à la consommation…) doivent être conservées. Il est nécessaire de faire un diagnostic pour mesurer les besoins de la juridiction : le temps qu’on passe au pénal, le nombre d’audiences, quels sont les besoins au civil, quels types de contentieux sont traités… Par exemple à Rennes, lorsqu’on voit toutes les grues, on se dit qu’il y a du droit immobilier et forcément du contentieux derrière. »

La pyramide de Maslow

Un des chevaux de bataille de Beatrice Rivail est le bien-être des salariés de la juridiction, car « quand on se sent bien, on fait du bon travail, on y met du sens, et c’est dans l’intérêt du justiciable ».

Et son second tient à l’animation de la juridiction « faire des conférences, expliquer les lois aux justiciables. On peut imaginer beaucoup de choses pour rendre la justice plus accessible, mieux la connaître. » Oui, mais voilà, pour avoir du personnel désireux de s’investir dans cette mission, il faut d’abord répondre à ses besoins primaires, on en revient au bien-être « C’est le principe de la pyramide de Maslow » décrypte la présidente. Des moyens donc et des effectifs suffisants.

« La compétence en propriété intellectuelle contribue au rayonnement de la juridiction »

Betarice Rivail est particulièrement fière de présider une juridiction riche de nombreuses compétences. « Ici c’est une juridiction interrégionale spécialisée qui possède une compétence particulière en matière pénale et s’étend sur 4 cours d’appel. Nous avons également une compétence en propriété intellectuelle qui contribue au rayonnement de la juridiction. J’en suis d’autant plus consciente que j’ai présidé en 2015 une chambre en propriété intellectuelle à Lyon. Il n’y a que 10 tribunaux en France qui ont cette compétence et il faut vraiment préserver cela. La propriété intellectuelle c’est quelque chose de précieux. »

Prêts pour le tout numérique ?

« Nous sommes en retard dans notre plan de transformation numérique par rapport à d’autres ministères. Je pense au ministère des Finances publiques où ils sont en avance sur nous en termes de dématérialisation et de numérisation. Il nous faut plus de temps pour réussir à moderniser la justice et cela veut dire avoir des applicatifs, peut-être moins nombreux, mais qui fonctionnent tout de suite, de manière évidente. Ce passage au zéro papier, il ne se fait pas comme ça. Il nécessite un accompagnement au changement : formation, présence de personnels techniques compétents qui suivraient notre progression. »

Votre vision pour l’avenir ?

Nous sommes dans une juridiction dynamique et créative. Ce tribunal à l’allure d’une soucoupe volante en est le reflet. Alors un maître mot : il ne faut pas lâcher prise et continuer à nous battre pour cette justice à laquelle nous aspirons tous !

3 questions à…

Une envie sur le territoire ?

C’est juste une idée à creuser pour l’instant…mais j’aimerais mettre en place une maison de la justice et du droit qui assurerait une présence judiciaire gratuite de proximité à tous les justiciables.

Vos endroits préférés en Bretagne ?

J’aime beaucoup Quiberon et Belle-Île-en-Mer, mais il faut que je découvre mieux Saint-Malo !

Vous avez passé un DEA, «sciences juridiques de la mer », quelle est votre course nautique préférée ?

La Route du Rhum. C’est spectaculaire de voir ces marins, leur volonté !

Dans le même dossier : La rentrée du Tribunal Judiciaire de Rennes