Me Maxime Tessier le répète partout où il croise des chefs d’entreprise. Des faits commis dans une société peuvent dégénérer sur le plan pénal. Ils peuvent être constatés lors d’une enquête à la suite d’une dénonciation, d’une plainte ou à l’initiative d’une administration (inspection du travail ou services vétérinaires, par exemple). À condition que l’entreprise auteure d’une infraction reconnaisse les faits, le procureur peut proposer une procédure de composition pénale. Cet outil de justice négociée, alternative à un procès, permet l’individualisation de la peine – il existe un panel d’une vingtaine de sanctions – mais implique le renoncement à certains recours, comme faire prononcer une nullité de procédure ou obtenir une relaxe. Avant d’accepter, « l’avocat de l’entreprise doit donc soigneusement évaluer la solidité du dossier, les précédents jurisprudentiels et les dispositions de l’entreprise cliente à aller au procès avant de choisir cette voie », explique le pénaliste. La clé de voûte est en fait cette question : l’entreprise obtiendrait-elle un meilleur résultat en allant à l’audience classique devant le tribunal ?
« La composition pénale se distingue par sa confidentialité, épargnant ainsi aux entreprises le poids d’une comparution publique devant un tribunal. Elle permet également de reprendre le contrôle sur le risque pénal. » Toutefois, l’homme de droit avertit : « Ce n’est pas parce que la procédure est simplifiée qu’elle est simpliste. C’est pourquoi il est crucial de comprendre les enjeux et de se faire conseiller par un avocat, même si sa présence n’est pas obligatoire dans cette procédure. »
Deux exemples de dossiers de composition pénale
- Ce commerce alimentaire du Grand Ouest, « une entreprise honorable », est contrôlé en possession de denrées alimentaires dépassant la date limite de consommation. Le risque encouru pour la personne morale dans cette situation peut s’élever jusqu’à 60 000 euros d’amende. « Après une évaluation approfondie des circonstances et des mesures correctives mises en place par l’entreprise pour éviter la récurrence de l’incident, le procureur a proposé une sanction réduite à 1 000 euros. Cette décision a pris en compte l’absence d’antécédents de l’entreprise et le faible niveau de préjudice. » Cet accord a été « source de soulagement et jugé satisfaisant » par l’entreprise visée. La composition pénale, validée par un juge, met fin à la poursuite.
- Autre entreprise du Grand Ouest, autre situation, dans l’industrie cette fois. Lors d’une opération de maintenance, un agent est victime de « blessures involontaires », une des qualifications pénales de l’accident du travail. « L’accident, de relative intensité, résultait d’un manquement non délibéré lié à un dysfonctionnement de la procédure d’arrêt, détaille l’avocat pénaliste. Il est reproché à l’employeur son niveau de diligence. L’enjeu pour l’entreprise, qui reconnaît sa part de responsabilité, est de négocier le montant de l’amende. » L’avocat, arguant de l’absence de défaillance majeure dans les mesures de sécurité et la démarche de l’entreprise pour éviter toute réitération – en l’espèce, le recrutement d’un technicien qualité -, a pu négocier une sanction proportionnée. En l’occurrence, une amende ajustée en fonction de son chiffre d’affaires, de ses bénéfices et de ses antécédents ou de leur absence. Si l’avocat estime que l’accord trouvé était « satisfaisant », il ne souhaite pas communiquer le montant de l’amende pour « éviter un effet tarif ». Il précise qu’en réalité, « le montant de l’amende peut faire l’objet d’éventuelles négociations. Parfois, cela permet de gommer les frais et les honoraires de défense ». L’accord n’empêche pas un salarié victime d’un accident du travail de réclamer l’indemnisation des dommages auprès du tribunal des affaires de sécurité sociale, « ce qui doit lui aussi être anticipé et mis dans la balance avant d’accepter un accord avec le Parquet ».