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Course au large. Imoca, la ligue pro qui s’envole

L’International Monohull Open Class Association (Imoca) rassemble 45 équipes internationales de course au large. Mais à l’instar des Ultim, Class 40 ou autres catégories de courses, c’est aussi une classe de voiliers monocoques de 60 pieds, soit 18,28 mètres, principalement destinés aux courses océaniques, en solitaire ou en équipage, comme le Vendée Globe, la Route du Rhum et la Transat Jacques-Vabre. Antoine Mermod, président de l’association depuis 2017, explique son fonctionnement et ses objectifs.

Antoine Mermod préside l'association Imoca, la classe des monocoques de 60 pieds très performante sur les Transats ou les tours du monde à la voile

Antoine Mermod, président de l’association Imoca ©Imoca

L’association Imoca, c’est quoi exactement ?

Antoine Mermod. C’est une association née en 1991, après le succès retentissant de la première édition du Vendée Globe 1989, très vite qualifié « d’Everest de la mer ». À l’époque, seuls treize bateaux participaient à ce « challenge » inédit, mais de nombreux skippers s’y sont très vite intéressés. C’est ainsi qu’ils ont décidé de créer une association spécifique réunissant les grands noms du circuit des monocoques de 60 pieds. Aujourd’hui, nous comptons 45 teams adhérentes, dont 40 engagées sur le seul Vendée Globe. Notre association concrétise en fait une ligue professionnelle mondiale qui réunit les meilleurs spécialistes des monocoques de 60 pieds, en solitaire ou en équipage.

Lors du défi Azimut organisé chaque année à Lorient, les monocoques testent les dernières technologies

Lors du défi Azimut organisé chaque année à Lorient, les monocoques testent les dernières technologies ©Liot Jean-Marie / Defi Azimut

Comment fonctionne l’association et quelle est votre feuille de route ?

A. M. Comme toute association, nous avons une assemblée générale composée de ses adhérents qui élit un Conseil d’administration. Son président est élu pour un mandat de deux ans renouvelables. Nous comptons douze salariés et disposons d’un budget annuel de 1,5 million d’euros, composé pour un tiers de cotisations des adhérents, un tiers de partenariats avec les courses et le dernier tiers est apporté par des partenaires privés.

Les monocoques de course volent grâce aux récents progrès technologiques des foils

Les monocoques de course volent grâce aux récents progrès technologiques des foils ©World Sailing / Jean-Louis Carli

Pour ce qui est de notre rôle, il est de quatre ordres. Nous avons d’abord une mission technique, avec l’établissement de règles propres à cette classe de bateaux, une sorte de boîte dans laquelle chaque coureur doit rentrer afin que les courses soient équitables et homogènes. On estime qu’environ 30 % du bateau est standardisé, notamment le mât et la quille. Leur production via des partenariats techniques permet également de faire baisser les coûts. Nous avons aussi mandat pour choisir les courses et assurer la communication à l’international. Enfin, nous déployons une stratégie RSE qui vise à diminuer l’empreinte carbone de la course au large.

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La classe Imoca s’est peu à peu imposée sur la scène internationale de la course au large. Comment expliquer un tel succès ?

A. M. Le Vendée Globe, la Route du Rhum ou The Ocean Race sont de véritables moteurs pour notre catégorie. C’est d’abord un franc succès populaire car entre 1,5 et 2 millions de personnes se déplacent pour assister aux départs ou aux arrivées. Ce sont des moments de très grande émotion. Mais notre succès s’explique aussi par le soutien indéfectible de nos partenaires qui, en retour, sont valorisés sur des courses qui réalisent entre 200 et 300 millions de recettes publicitaires.

Enfin, nous avons acquis une incontestable vocation internationale en contractant une alliance avec les Anglo-saxons. Un mariage de raison qui permet de réunir un plateau de coureurs exceptionnels, tout en faisant plus de courses. Et, pour les skippers, c’est génial de participer à des compétitions légendaires. Le fait d’avoir les mêmes bases de bateaux à des coûts maîtrisés offre également la possibilité aux petits budgets (500 000 euros) comme aux plus gros (3 millions d’euros) de s’affronter presque à armes égales.

Les monocoques de course volent grâce aux récents progrès technologiques des foils

Les monocoques de course volent grâce aux récents progrès technologiques des foils World Sailing / Jean-Louis Carli

Pour revenir sur votre stratégie RSE, quelles sont vos priorités ?

A. M. Avec Tanguy de Lamotte, Louis Burton ou Boris Hermann – pour ne citer qu’eux -, la nouvelle génération de skipper est très exigeante en matière de RSE. Et ce sont eux qui ont exigé d’inscrire cette responsabilité dans notre sport. Nous l’aurions certainement fait naturellement mais ils ont insisté pour que cela se traduise en actes. D’où notre Charte Teams IMOCA et ses sept thématiques de transition écologique, labellisée par le ministère des Sports. Nous nous sommes donc emparés de la question afin d’en comprendre les différents enjeux. Entre 2020 et 2024, les premières décisions concrètes ont été prises. Pour l’instant sans grande publicité car nous ne voulons pas faire de « greenwashing ».

Nous participons néanmoins, dans le cadre d’un partenariat avec l’Unesco », à des relevés scientifiques (hydrographie, océanographie, météorologie, pollution plastique…) dans des endroits où nous sommes les seuls à aller. Nous avons aussi mis en place sur La Base, à Lorient en collaboration avec Lorient Agglomération et Kellie Covington, dès juin 2020, la Give Box. Une « ressourcerie » de matériels et d’équipements neufs ou peu usés, destinée à tous les skippers locaux. Nous avons aussi lancé des études sur le cycle de vie de nos bateaux et nous prévoyons de réduire leur empreinte carbone de 15 % d’ici à 2028. Le même travail a été fait sur les voiles avec les cinq plus grands constructeurs mondiaux, avec l’objectif d’obtenir rapidement un label. En attendant, nos skippers ont, depuis 2023, l’obligation d’embarquer une voile Green Sail à bord. De nouvelles actions devraient prochainement être annoncées…

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