Couverture du journal du 19/04/2024 Le nouveau magazine

Innov’Sail à Lorient : la décarbonation met les voiles

La Cité de la Voile-Eric Tabarly de Lorient a réuni durant 3 jours les meilleurs chercheurs et industriels européens dans le domaine du maritime. Et notamment ceux qui travaillent sur le transport vélique. La voile pourrait-elle devenir le mode de propulsion maritime du futur ? De nombreux projets sont actuellement à l’étude ou même en cours. Innov’Sail y consacre un colloque de très haut niveau.

Grain de sail : la marque de chocolat bretonne mise sur le transport vélique pour ses transatlantiques

Grain de sail : la marque de chocolat bretonne mise sur le transport vélique pour ses transatlantiques

La 6e édition vient de s’achever à Lorient, le cœur de la Bretagne Sailing Valley, où se trouvent de nombreuses industries de haute technologie du yachting et de la voile de compétition ainsi que des équipes de course. INNOV’SAIL 2023 était co-organisée par l’École Navale, la Cité de la Voile-Eric Tabarly et Bretagne Développement Innovation dans le cadre du programme Eurolarge Innovation. Tous les trois ans depuis sa création en 2008 par la Cité de la Voile-Eric Tabarly et l’École Navale, la conférence internationale INNOV’SAIL sur l’innovation dans les voiliers de haute performance et la propulsion des navires assistée par la voile réunit les plus grands experts mondiaux dans le domaine de la recherche sur la voile. Plus de 150 chercheurs, industriels, marins, institutionnels… Bref toutes les têtes pensantes du maritime sont venues réfléchir à l’avenir de la propulsion vélique.

Les organisateurs du salon Innov’Sail 2023 à la Cité de la voile ©7J-DB

Les organisateurs du salon Innov’Sail 2023 à la Cité de la voile ©7J-DB

17% des émissions de gaz à effet de serre d’ici 2050 ?

S’adapter, innover, transformer… Tous les acteurs du maritime s’accordent à reconnaître qu’il est nécessaire de réinventer les modes de propulsion maritime pour décarboner un secteur qui joue les mauvais élèves. En 2022, l’ensemble de la flotte mondiale compte plus de 100 000 bateaux, dont la moitié de navires marchands, les plus consommateurs d’énergie : entre 600 et 1 100 millions de tonnes de CO₂ par an au cours de la dernière décennie, selon le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC). La pollution du transport maritime représente actuellement 3 % des émissions de gaz à effet de serre dans le monde et devrait s’élever à 17 % d’ici à 2050 si rien n’est fait. Face à ce constat, lors de la conférence mondiale pour le climat à Charm El-Cheikh de 2022, plusieurs pays ont demandé à l’Organisation maritime internationale d’être ambitieuse et de viser le « zéro carbone » d’ici à 2050.

Réduire la vitesse : une première piste

Près de 90% des échanges commerciaux entre les différentes parties de la planète se font via les mers et les océans… le transport maritime est donc un levier important de décarbonation. Le plus grand atout du transport maritime n’est pas la vitesse, mais réside dans la grande capacité des navires ainsi que la continuité du trafic. Ainsi, chaque année, les navires transportent plus de 8 milliards de tonnes de fret. La réduction de la vitesse des navires a été la solution proposée par la France à l’Organisation maritime internationale. Selon le ministère de la Transition écologique, un navire pétrolier qui navigue à 11 nœuds plutôt qu’à 12 peut réduire sa consommation d’énergie de 18%. Cette réduction peut même atteindre les 30% avec une navigation à la vitesse de 10 nœuds.

Une révolution vélique ?

La voile ne serait donc pas un mode de propulsion totalement anachronique pour le transport de marchandises. Étudiants, industriels et chercheurs tentent donc de proposer des solutions de haute technologie qui remettrait la voile au goût du jour, émettrait peu de polluants et garantirait la continuité des échanges commerciaux. La Bretagne Sailing Valley pourrait être le berceau de cette révolution vélique…

 

La filière bretonne mise sur le vent

D’après une étude réalisée par la Région Bretagne en 2022, 156 entreprises issues principalement des secteurs du naval, du nautisme et de la voile de compétition, localisées majoritairement dans le Morbihan, constituent une filière émergente de la propulsion vélique. 55% d’entre elles considèrent ce marché comme « prioritaire à important ».
La propulsion par le vent est le mode de propulsion principal des projets de 64% des 236 entreprises ayant répondu à l’enquête. L’hydrogène, l’électrique et le GNL ne représentent que respectivement 38%, 36% et 25% des projets.
Actuellement, 70% des entreprises travaillent sur des profils minces (voiles souples ou panneaux rigides), 49% sur des profils épais (ailes souples, rigides, gonflables, multi-éléments), 34% sur les kits. Rotors, formes de carènes, profils aspirés et turbines éoliennes comptent pour 16 à 20%. L’émergence de cette nouvelle filière pourrait créer plus de 200 emplois et représenter 28M€ de chiffre d’affaires.