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Mobilité Internationale : Expatriation, anticipez votre départ

On compte aujourd'hui près de 2 millions de Français installés à l'étranger, souvent pour des raisons professionnelles. Malgré la crise sanitaire qui a joué un rôle indéniable sur les projets de mobilité internationale, les Français continuent de plébisciter l'expatriation, selon un sondage de l'Observatoire de l'expatriation. Malgré les incertitudes liées au contexte, s'expatrier offre en effet de nombreuses opportunités, que ce soit pour découvrir une nouvelle culture, étudier, accroître ses capacités financières, ou encore profiter de sa retraite. Alors, pour éviter les déconvenues, anticiper sera la clé afin d'organiser votre sécurité juridique et maîtriser votre situation. Entretien avec Maître Damien Gueguen, notaire à la Chambre des notaires d’Ille-et-Vilaine.

Maître Damien Guéguen, anticipez votre départ ! notaire à la Chambre des notaires d’Ille-et-Vilaine

Maître Damien Guéguen, anticipez votre départ ! notaire à la Chambre des notaires d’Ille-et-Vilaine ©DR

Quelles sont les précautions à prendre avant de partir ?

On parle d’expatriation dès lors que l’on séjourne plus de 183 jours hors de France. Ce délai peut entraîner, selon votre situation, des dispositions spécifiques en matière fiscale et de protection sociale. En effet, les impacts juridiques d’une expatriation peuvent être nombreux et concerner différents domaines liés à la famille, l’immobilier, la fiscalité ou bien la loi applicable dans votre pays d’accueil.

En effet, vous serez confronté à l’applicabilité éventuelle du droit local étranger. L’introduction d’éléments d’extranéité dans votre vie – c’est-à-dire étranger, qui peut causer l’application d’une législation étrangère (nationalité étrangère d’une personne dans un couple, résidence habituelle à l’étranger, achat d’un bien immobilier sur place…) – peut avoir des incidences importantes.

Faire le point sur votre situation familiale et patrimoniale avec votre notaire vous permettra de prendre les dispositions nécessaires, notamment en matière fiscale et de protection sociale pour neutraliser ou optimiser les effets juridiques de l’expatriation.

Dans un second temps, vous devrez vous pencher sur les aspects administratifs. Dans certains pays, il vous faudra remplir certaines formalités comme l’obtention d’un titre de séjour ou d’un visa de travail. Vous aurez également à clôturer ou non vos comptes bancaires, vendre ou louer votre résidence principale, informer votre caisse d’allocations familiales, faire les démarches auprès de la caisse de retraite des expatriés, ou encore vous inscrire au consulat.

Quel est le régime de protection sociale à l’étranger ?

Les coûts des soins médicaux et hospitaliers peuvent s’avérer très élevés selon le pays choisi. Par principe, vous ne serez plus rattaché au régime de sécurité sociale français et serez donc privé de protection, sauf si vous effectuez au préalable les démarches imposées par le pays d’accueil. En fonction du pays, une continuité des droits de protection peut être assurée.

Vous pouvez consulter la disposition des différents accords internationaux sur le site du Centre de Liaisons européennes et internationales de sécurité sociale (CLEISS).

En faisant le choix de bénéficier du système français, vous continuerez à cotiser volontairement auprès de différents organismes notamment pour les assurances maladie (Caisse des Français de l’étranger CFE), et vieillesse (Caisse des Français de l’étranger pour la retraite de base et Humanis pour la retraite complémentaire).

Quel est l’intérêt d’avoir un contrat de mariage dans un contexte international ?

Avec ou sans contrat, les époux sont nécessairement soumis à un régime matrimonial.

A défaut de contrat, il est souhaitable de vous renseigner sur la loi applicable dans votre pays d’accueil, la question du régime matrimonial peut se poser, que ce soit pour vous protéger toute la durée de votre mariage, mais aussi en cas de dissolution de celui-ci, pour cause de décès ou de divorce.

Au cours du mariage, vous pourrez par exemple changer de nationalité, de domicile ou acquérir des biens dans différents pays. Afin d’assurer la permanence du régime matrimonial, mieux vaut donc établir un contrat préalablement au mariage pour fixer précisément la loi et le régime matrimonial applicable dans le contexte international.

Bon à savoir

Les couples mariés sans contrat depuis le 1er septembre 1992 peuvent se voir appliquer le régime légal du pays où ils s’installent pendant 10 ans.

Dès qu’une expatriation est envisagée, il est important de faire établir une « déclaration de loi applicable » pour déterminer et fixer la loi et le régime matrimonial qui doit s’appliquer.

Quelles sont les règles d’imposition sur les revenus et le capital ?

Fiscalement, vivre à l’étranger ne suffit pas pour être qualifié d’expatrié. Les obligations déclaratives et le traitement fiscal des revenus dépendront des conditions convenues entre le droit français et celui du pays choisi.

En Espagne par exemple, une convention fiscale répartit l’imposition entre les deux pays selon la nature du revenu et permet d’éviter une double taxation. Certains retraités ont choisi le Portugal pour sa douceur de vivre et sa fiscalité attractive. En effet, les pensions de retraite (uniquement celles du secteur privé) sont exonérées pendant 10 ans. En Espagne, comme au Portugal, seule une taxe foncière est perçue par les propriétaires.

Sur le plan fiscal, la domiciliation d’une personne est parfois difficile à déterminer. Si vous êtes domicilié dans deux États et que vous êtes propriétaires de biens en France et à l’étranger, vous pouvez alors devenir redevable de l’impôt sur la fortune immobilière. Si votre domicile fiscal n’est pas en France, l’IFI sera dû à raison de vos seuls biens situés en France. Pour être redevable de l’IFI, votre patrimoine net situé en France doit avoir une valeur supérieure ou égale à 1 300 000 €. Cet impôt pèse uniquement sur les actifs immobiliers.

Le pays où vous serez domicilié peut également vous soumettre à l’impôt sur le patrimoine. Attention donc aux doubles impositions ! Toutefois, la France a signé des conventions internationales en la matière afin d’éviter ce problème.

Bon à savoir

Un non-résident peut détenir des biens en France ou à l’étranger. Ce statut peut parfois présenter un certain nombre d’avantages. Renseignez-vous auprès de votre notaire.

Quelle est la loi applicable aux donations et successions internationales ?

A tout âge, vous soucier de votre succession vous permettra de protéger vos proches. En l’absence de dispositions de dernière volonté, la loi applicable à l’ensemble de la succession est celle de la dernière résidence habituelle de la personne décédée. Par exemple, si votre résidence habituelle se situe en Espagne, la loi espagnole sur les successions s’applique pour les biens de la succession. Elle prévoit notamment une part de réserve héréditaire aux enfants différente de celle prévue par la loi française.

Toutefois, vous pouvez changer cela en établissant un testament pour désigner la loi régissant l’ensemble des biens de votre succession, à savoir : la loi de sa nationalité.

Il est préférable que vous consultiez votre notaire pour le rédiger le plus clairement possible. De cette manière, votre testament sera inscrit au fichier central des dispositions de dernières volontés afin que l’existence du testament soit connue après le décès. En matière de fiscalité successorale, plusieurs problématiques pouvant se présenter, n’hésitez pas à vous renseigner directement auprès de votre notaire ou de la Direction des Impôts des Non-Résidents.

Bon à savoir

Tout Français se trouvant à l’étranger et qui souhaite rédiger un testament doit veiller à ce que la validité en soit reconnue à la fois par les autorités françaises et les autorités étrangères, notamment celles du lieu de sa résidence qui, du fait des circonstances au moment du décès peuvent être concernées.

Top 5 des destinations des Français expatriés

  1. Suisse
  2. États-Unis
  3. Royaume-Uni
  4. Belgique
  5. Allemagne

90% des expatriés français se disent satisfaits de leur expatriation.

84% recommanderaient l’expérience à leur entourage.

(Sondage : Observatoire de l’expatriation, Avril 2021)

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