Se tourner vers le passé pour mieux appréhender le présent. L’adage correspond autant à la vie de Christelle Molina qu’aux valeurs du géant de l’audiovisuel français qu’est l’Ina. Car pour comprendre comment la déléguée régionale est arrivée à ce poste, il faut remonter en 1976, au cœur de la capitale des Alpes-Maritimes.
Juriste de formation, la jeune Christelle Molina passe des concours de journalisme, « que j’ai ratés. Passée par la fac de Droit et Sciences Politique, j’ai décroché un stage à la direction de la communication de la ville de Nice ». Convaincue, l’étudiante se tourne vers une formation en communication et décroche une alternance dans une agence parisienne. Une opportunité, qu’elle a su saisir. Le début d’une longue série.
Vient l’heure de trouver son premier emploi. Ambitieuse, « j’ai rencontré des officiers de la marine et j’ai demandé si un poste dans la communication était possible ». Banco. « Je travaillais pour le service hydrographique et océanographique de la marine (Shom), à Brest (production de la connaissance du fonds et de la cartographie marine). » Sa première rencontre avec la Bretagne, à 26 ans. « La vie est faite d’opportunités et de rencontres. » Dans un élan de curiosité intellectuel, Christelle Molina reste dans les sciences et entre à l’IGN (Institut national de l’information géographique et forestière) à Paris, en tant que chargée de communication. « J’aime toujours apprendre de nouvelles choses. C’est mon leitmotiv professionnel. » Sans néanmoins perdre de vue l’ambition : « Au bout de deux ans, j’ai pris la tête du département communication à Paris. »
Mais alors comment la jeune Niçoise (et un peu Parisienne) est-elle retournée en Bretagne ? Le hasard d’une rencontre, toujours. « Sur mon chemin, j’ai rencontré un Breton qui m’a proposé de venir travailler dans une agence de communication à Quimper. » Court épisode, qui lui permet néanmoins de travailler avec de grands groupes bretons. De nouveau en recherche d’emploi, « le cabinet de recrutement dans lequel j’étais inscrite m’a proposé un entretien pour un poste à l’Ina, basé à Rennes, où j’ai été recruté en 2015 ».
« L’avantage de l’Ina, c’est de s’affranchir de l’immédiateté. »
Une aventure qui dure depuis près de dix ans. Pour une personne qui aime le changement professionnel, dix ans, cela fait beaucoup. En même temps, le poste de déléguée régionale est « un poste passionnant, les missions sont toujours différentes. Mon rôle est d’être la cheffe d’orchestre, la pilote de cette antenne et de nouer des liens, des synergies avec quasiment tous les publics du territoire. C’est ce qui fait la richesse de mon métier : je découvre et j’apprends tous les jours des choses. Nous travaillons aussi bien avec une université, qu’avec des collectivités, conseils départementaux… » Et l’Ina, ce ne sont pas seulement les archives disponibles au grand public. Ce sont des conférences, des colloques, des sites multimédias, des montages audiovisuelles pour des événements d’ampleur, de l’animation de masterclass… À l’année, plus de 100 projets sont développés, dont 20 d’ampleurs.
Créée en 1997, l’antenne régionale de l’Ina fait partie des six antennes au niveau national et regroupe trois régions : Bretagne, Centre-Val de Loire et Pays de la Loire. Tout ce périmètre… pour une équipe de seulement quatre personnes. Dans l’équipe, tout le monde est multitâche. « L’Ina, c’est un média patrimonial. Nous essayons souvent de partager des projets qui relèvent de thématiques sociétales comme la place des femmes dans la société, la reconnaissance des genres, des valeurs d’ouverture, de tolérance… Pour y travailler, la curiosité intellectuelle, l’envie d’apprendre de l’autre et le partage sont des valeurs primordiales. »
Près de 30 millions d’heures et de sons captés au titre du dépôt légal au niveau national, qu’il faut valoriser aussi en région. Cela donne lieu à des situations uniques. « De nombreuses personnes veulent récupérer des images, notamment certaines personnes qui ont perdu un proche et qui ont besoin de les retrouver à travers des images… Autrement, à l’occasion de l’anniversaire de mariage des grands-parents, un couple a demandé des images de leur mariage, filmé par la télévision de l’époque, dans les années 1960. » Un reflet de la société de l’époque. « L’avantage de l’Ina, c’est est aussi de s’affranchir de l’immédiateté pour décrypter le présent et mieux comprendre comment on en est arrivé là, comment se projeter demain. »
D’ailleurs, comment se projette Christelle Molina dans l’avenir ? « Aujourd’hui, soit je quitte l’Ina, soit je monte dans de nouvelles fonctions mais cela impliquerait que je retourne à Paris. Et là, ce n’est pas possible. Je n’ai pas de projet particulier en tête, un projet philanthropique peut-être. Dans un tout autre registre, je suis réflexologue, j’aimerais pouvoir m’installer et en vivre. C’est une de mes autres passions, comme l’est le chant. » Des projets, au gré des prochaines rencontres.