Couverture du journal du 02/10/2024 Le nouveau magazine

GRAND FORMAT. Baxter International  : au chevet des malades

C’est une marque emblématique du matériel médical. Hier, elle s’appelait Hill-Rom, aujourd’hui : Baxter. Créée au sortir de la Seconde Guerre Mondiale, l’entreprise morbihannaise est une success story bretonne. Basée à Pluvigner depuis 1972, cédée au géant américain dans les années 1990, elle s’est hissée, au fil des ans, dans le top 3 mondial des fabricants de mobilier et de matériels médicaux et compte rester sur le podium, en investissant dans les innovations et le parcours de soins de demain. Rencontre avec Marc Capdeville, directeur du site de Pluvigner.

©StudioCarlito

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Chaque année, 36 000 lits médicalisés et 50 000 meubles (chevets, tables à manger au lit, etc.) sortent des lignes de l’usine de production de Pluvigner. 150 à 160 lits par jour, soit au moins un toutes les 4 minutes ! Depuis 2017, la production de matelas thérapeutiques Baxter est exclusivement de la responsabilité de l’usine de Pluvigner, après la fermeture de celle de Montpellier. Plus de la moitié des 450 collaborateurs du site se consacrent exclusivement à la production et, depuis le Morbihan, Baxter livre une centaine de pays. Baxter France annonce un chiffre d’affaires de 100 millions d’euros. Discrète, l’entreprise est néanmoins au-devant de la scène quand on évoque le matériel médical. Il suffit de visiter le showroom pour s’apercevoir de la haute technicité de la production. Chambre médicale digitalisée, bloc opératoire ultramoderne et matelas « intelligents ». On est loin des sommiers originaux imaginés par le morbihannais Eugène Le Couviour, inventant le lit médicalisé dès 1965 et batissant un success story industrielle.

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Eugène Le Couviour, de l’artisanat à l’industrie

Issu d’un milieu modeste de la campagne morbihannaise, Eugène Le Couviour, qui a quitté l’école à 12 ans, a commencé comme saisonnier agricole dans la Beauce. En 1946, en pleine reconstruction, il revient dans le Morbihan où il commence à construire des sommiers à Bieuzy-Lanvaux, petite bourgade voisine de Pluvigner. En 1965, il emploie une vingtaine de salariés et développe le premier lit médicalisé. Grâce à cette invention, il devient rapidement leader en France dans la fabrication de matériel hospitalier. La success story industrielle ne sera jamais démentie, il emploie jusqu’à 850 personnes et cède l’entreprise en 1991 à la société américaine Hill-Rom pour quelque 55 millions d’euros. De 1966 à 1995, fort de sa notoriété de capitaine d’industrie, Eugène Le Couviour est élu maire de la commune de Pluvigner, où il a déménagé sa société. Il est également conseiller général de 1971 à 1979. Son nom est aussi associé à une affaire judiciaire qui fera la une des journaux, un drame familial en 2009 sur fond d’héritage, entre ses trois enfants et les trois enfants de sa seconde femme.

Fusion Hill-Rom/Baxter

En 1991, la société est rachetée par la société américaine Hill-Rom (siège à Chicago), qui compte plus de 20 sites industriels dans le monde et emploie 10 000 personnes. En septembre 2021, l’Américain Baxter International (Deerfield, Illinois), intègre Hill-Rom, pour environ 10,5 milliards d’euros, afin de combiner leurs domaines de compétences et s’imposer dans le domaine de l’innovation médicale. « Baxter et Hill-Rom s’unissent pour relever les défis d’un système de santé mondial en évolution rapide », annonçait le communiqué de presse de Baxter International au moment du rachat.

Élu site de l’année par le groupe Baxter en 2023, pour ses performances opérationnelles en innovation, sécurité, environnement, qualité, satisfaction du client.

14 milliards d’euros de chiffre d’affaires à l’échelle mondiale

« Ici, nous nous occupons des dispositifs médicaux relatifs à la chambre d’hôpital : lits médicalisés, surfaces thérapeutiques, chevets et tables à manger au lit, explique Marc Capdeville, directeur du site de Pluvigner. Sur nos autres sites en France, nous produisons également des poches de perfusion et de nutrition, ainsi que des filtres pour les appareils à dialyse. Baxter est un acteur majeur du parcours de soins, en France comme ailleurs dans le monde. » Petit rappel chiffré : Baxter dans le monde, ce sont environ 60 000 collaborateurs et près de 14 milliards d’euros de chiffre d’affaires. Et les performances du site de Pluvigner sont regardées avec une très grande attention outre-Atlantique. « En 2023, nous avons été élus site de l’année par le groupe Baxter grâce à nos performances opérationnelles en innovation, sécurité, environnement, qualité, satisfaction du client, se félicite Marc Capdeville. C’est un message très encourageant pour toutes nos équipes, symbolique certes et, en même temps, une belle reconnaissance. »

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Un site mondial pour l’innovation

Une pression positive qui alimente le niveau d’innovation du site français. Mi-2017, un nouveau centre d’innovation a été inauguré à Pluvigner. 70 salariés y développent et testent les produits. Leur objectif principal : créer de la donnée pour optimiser les soins. Wi-fi connecté à l’hôpital, pesée intégrée du patient, gestion des signes vitaux et amélioration du confort du patient… Les lits médicalisés embarquent « de plus en plus d’intelligence et de technologies », reprend Marc Capdeville. En décembre 2023, un nouveau matelas connecté est sorti des chaînes de production. « La digitalisation des soins est l’avenir et nous le préparons, ajoute-t-il. Pour cela, Baxter joue un rôle d’accélérateur indispensable. Et pas seulement en nous challengeant sur la qualité de notre travail. Le groupe investit, chaque année, près de 3 millions d’euros dans l’innovation. »

« Nous travaillons en permanence à améliorer notre plan de succession, en formant et en identifiant au moins deux personnes sur le même poste. »

Des performances basées sur l’humain

Mais le directeur du site, employé par Hill-Rom depuis plus de vingt ans, précise que les performances de ses collaborateurs tiennent beaucoup aux changements de management. « Ici, nous misons dorénavant sur la priorité donnée à l’intelligence émotionnelle. Et ça marche. J’en parle d’autant plus facilement que j’étais moi-même un manager trop directif », avoue-t-il. En prenant la direction du site de Pluvigner en 2016, Marc Capdeville était devenu très, voire trop, directif et voulait que tout le monde fasse uniquement comme il l’exigeait : « Au fil des mois, des années, je me sentais de plus en plus seul, autant professionnellement que personnellement. » Mais il a pu compter sur « son ange gardien », son épouse, comme élément déclencheur de sa transformation. « Je suis allé chercher mon passé avec l’aide d’un coach professionnel et, en un an, j’ai réussi à me reconnecter avec moi-même, un voyage sans fin : une meilleure connaissance de soi pour une meilleure relation aux autres. »

L’intelligence collective, ça marche

Avouant un très grand soulagement à la suite de cette thérapie et une nouvelle façon d’aborder la vie avec sagesse « et vertu« , le directeur a voulu en faire profiter tout le monde, en commençant par ses managers. « C’est aujourd’hui complètement ancré dans la politique RH du site de Pluvigner, où nous avons mis en place des parcours de formation sur l’intelligence émotionnelle et l’intelligence collective. Notre propre voyage managérial est comme la marque de fabrique de ces dernières années », dit-il avec satisfaction. Fidèle à cette nouvelle approche managériale et avec sincérité, le directeur n’oublie pas de rendre hommage à ses équipes : « Le Covid a été une sorte de validation de tout ce que nous avons mis en place ces dernières années. Même si tout le monde avait peur, tous nos collaborateurs sont restés unis pour sauver des vies ! Nous ne nous sommes jamais arrêtés et nous avons fourni tous nos clients. Nous avons réussi à produire 54 000 lits avec tous les moyens dont nous disposions, alors qu’en temps normal nous sommes plutôt aux alentours de 36 000, une aventure humaine incroyable ! »

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Le bien-être au travail reconnu en interne

Pas peu fier du travail accompli par ses équipes en période de crise, le directeur insiste sur le cercle vertueux déclenché par la nouvelle approche managériale. Grand amateur de rugby, il n’hésite pas à parler « d’entreprise ovale. Nous tenons à rester une entreprise performante mais pas au détriment de nos équipes, insiste-t-il. Le collectif est bien plus qu’une somme d’individualités ! Quand nous avons des équipes engagées, il y a de l’innovation et de la performance. Et, comme par hasard, dès que nous avons travaillé sur nous, sur la façon de gérer les activités en prenant en compte le savoir-faire et le savoir-être, les résultats se sont améliorés. Et Baxter s’en est aperçu. Dès 2021, le groupe a décidé d’investir sur notre site pour l’innovation et l’amélioration de toutes les activités opérationnelles. » En interne, ils sont plus de 90 % à recommander leur entreprise comme une « Great Place To-Work » pour la sixième année consécutive.

« Quand nous avons des équipes engagées, il y a de l’innovation et de la performance. »

L’égalité homme/femme encore en chantier

Le directeur n’oublie pas de préciser que le bien-être au travail comprend également une forte notion environnementale et souligne la labellisation Ecovadis Gold du site, avec 98 % de déchets recyclés et 30 % d’économies d’énergie réalisées sur les deux dernières années. Avec honnêteté, il précise néanmoins qu’il reste encore des efforts à faire pour que les femmes accèdent en plus grand nombre à des postes de direction : « Sur ce sujet de parité femmes hommes, j’avoue que nous sommes encore trop faibles, mais nous y travaillons en préparant nos talents de demain. » Deux collaborateurs à temps plein animent le centre de formation interne, l’Xcellence Academy créée en 2021 – une exception française chez Baxter -, afin de former les futurs collaborateurs et gérer les montées en compétences des forces en présence. Le directeur n’oublie pas de préciser qu’il travaille sans relâche à la continuité du business. « Nous travaillons en permanence à améliorer notre plan de succession en formant et en identifiant au moins deux personnes sur le même poste, explique-t-il. Même en production, les opérateurs sont formés à trois postes. Je fais toujours en sorte de préparer le coup d’après, surtout sur des postes critiques. » Marc Capdeville aime à rappeler à tous ses collaborateurs, managers compris, qu’il compte sur eux pour contribuer à la réussite du groupe, bien au-delà de leur seul poste de travail, en s’engageant sur des programmes collectifs. Toujours avec le sourire, il conclut en rappelant que « le seul arbitre, c’est la concurrence ».

Bonus :

Votre paysage préféré ? La côte, l’horizon, la mer… J’aime notamment aller pique-niquer sur une plage de La Trinité-sur-Mer, mais je ne dirai pas laquelle !

Votre hobby/sport préféré ? Le rugby sans conteste, depuis toujours. Je suis fan inconditionnel de Toulouse. J’ai été aussi président du club d’Auray et je suis très fier que nous ayons accédé à la Fédérale 2.

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Votre musique entêtante du matin ? J’aime beaucoup la chanson Mes rêves de Grand Corps Malade, qui parle des enfants et de la transmission.

Votre moment préféré ? Quand je rentre chez moi le vendredi et que nous refaisons la semaine avec ma femme. Accompagné d’un petit verre de bourgogne, c’est un moment de partage que j’apprécie beaucoup.

Quel vin de Bourgogne ? (long silence) J’en aime plusieurs, mais il faut bien trancher… Le Gevrey-Chambertin (à consommer avec modération, bien sûr).

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