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DOSSIER. L’œil du notaire : tout savoir sur le testament 

Un testament est un acte juridique essentiel par lequel une personne exprime ses volontés concernant la disposition de ses biens après son décès. Ce document permet d'organiser sa succession de manière précise, en veillant à ce que les biens soient transmis conformément à ses souhaits. Expertise réalisée par Nathalie Roulet, notaire à la chambre interdépartementale des notaires de la cour d'appel de Rennes (35). 

Nathalie Roulet, élue à la chambre interdépartementale des notaires de la cour d'appel de Rennes

Nathalie Roulet, élue à la chambre interdépartementale des notaires de la cour d'appel de Rennes ©Chambre interdépartementale des notaires de la cour d'appel de Rennes

En l’absence de testament, la loi détermine les héritiers et la répartition des biens selon un schéma strict, souvent en fonction du lien de parenté avec le défunt. Cette répartition automatique peut ne pas correspondre aux volontés du testateur.

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En droit français, le testament est un outil indispensable pour ceux qui souhaitent prévoir l’avenir de leurs proches et éviter les conflits familiaux. En rédigeant un testament, le testateur clarifie ses intentions et désigne précisément les bénéficiaires, ce qui permet de prévenir les disputes et les malentendus.

Cet article expose l’intérêt du testament ainsi que les modalités de sa rédaction et de sa conservation.

L’intérêt du testament

Le testament est destiné à toute personne, juridiquement capable (sauf cas particuliers), majeure ou mineure émancipée, souhaitant organiser la répartition de ses biens après son décès.

Il est particulièrement recommandé dans certaines situations :

  • Les parents soucieux de l’avenir de leurs enfants

Pour les parents, le testament offre la possibilité de désigner un tuteur pour leurs enfants mineurs, en cas de décès prématuré. Cela permet de s’assurer que les enfants seront confiés à une personne de confiance, choisie par les parents, plutôt qu’à un tuteur désigné par le tribunal. Il offre également la possibilité de prévoir des dispositions particulières pour des proches vulnérables, comme un enfant handicapé, en organisant un cadre de protection et de gestion de leurs biens après le décès du testateur.

  • Les couples non mariés

En France, les partenaires de Pacs et les concubins ne bénéficient pas des mêmes droits successoraux que les époux. Un testament est donc particulièrement important pour ces couples, car il permet de léguer des biens à son partenaire et de le protéger financièrement. Sans testament, le partenaire survivant pourrait se retrouver dans une situation précaire, n’ayant droit à aucune part de la succession. Le testament est donc crucial pour protéger le survivant, notamment en lui octroyant un droit d’usage sur le domicile.

  • Les familles recomposées

Dans les familles recomposées, le testament est un outil précieux pour organiser la répartition des biens entre les enfants de différentes unions. Le testament permet également de protéger les intérêts du conjoint survivant tout en respectant les droits des enfants issus d’un premier mariage.

  • Les personnes sans héritiers directs

Pour les personnes sans héritiers directs, comme les célibataires sans enfants ou les couples sans descendants, le testament est essentiel pour désigner les bénéficiaires de leur patrimoine. Sans testament, leurs biens seraient répartis selon les règles légales de la dévolution successorale, qui pourraient ne pas refléter leurs souhaits. Le testament offre la possibilité d’optimiser la transmission de son patrimoine en tenant compte des aspects fiscaux. En planifiant la succession, le testateur peut réduire les droits de succession à payer par ses héritiers, notamment en utilisant les abattements fiscaux.

  • Les personnes souhaitant faire des legs spécifiques

Certaines personnes souhaitent avantager un ami proche ou soutenir des causes et des associations en léguant tout ou partie de leur patrimoine. En plus de répondre à une volonté personnelle de contribuer au bien-être social ou à une cause particulière, les legs à des organismes reconnus d’utilité publique peuvent bénéficier de régimes fiscaux avantageux.

En droit français, la liberté testamentaire est limitée par la réserve héréditaire, une part minimale du patrimoine qui doit être obligatoirement attribuée aux héritiers réservataires (les enfants ou descendants du défunt, ou, à défaut, le conjoint). Le reste du patrimoine, appelé quotité disponible, peut être librement légué selon les volontés du testateur.

Comment rédiger, conserver et modifier un testament ?

En droit français, il existe plusieurs types de testaments, chacun avec ses propres modalités et conditions de validité.

Les trois types sont le testament olographe, le testament authentique et le testament mystique.

Le testament olographe est le plus simple à réaliser. Il doit être entièrement écrit, daté et signé de la main du testateur. L’utilisation d’un ordinateur ou d’une machine à écrire rendrait le testament nul.

C’est la forme la plus simple et la plus économique, mais elle présente des risques d’approximation dans la rédaction rendant l’interprétation difficile ou sujette à contestation, mais également des risques d’oubli ou de perte.

Le testament authentique est dicté par le testateur à un notaire en présence de deux témoins, ou de deux notaires. Ce type de testament offre une grande sécurité juridique car il est rédigé et conservé par un professionnel du droit, qui s’assure du respect des formalités et de la volonté du testateur, de la conformité à la loi et de la capacité du testateur.

Le testament est conservé par le notaire et enregistré au Fichier central des dispositions de dernières volontés (FCDDV).

Ce type de testament est particulièrement recommandé pour les successions complexes, dans le cas de mésentente familiale ou d’un testateur âgé.

Le testament mystique est un type de testament moins courant. Il est écrit par le testateur ou une autre personne, puis remis clos et scellé à un notaire en présence de témoins. Le contenu du testament reste secret jusqu’à son ouverture après le décès du testateur. Ce type de testament offre une confidentialité maximale, mais nécessite également des témoins pour son dépôt chez le notaire.

Il est rarement utilisé en pratique car il combine les inconvénients des deux autres formes (complexité et coût de l’authentique, risques de l’olographe).

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  • Le contenu du testament

Un testament doit contenir certains éléments essentiels :

– L’identité du testateur : nom, prénom, date et lieu de naissance…

– La désignation des bénéficiaires : les personnes ou entités qui recevront les biens, ainsi que la nature et la répartition des biens légués.

– La signature du testateur : elle authentifie le document.

– La date de rédaction : indique le moment où les volontés ont été exprimées, ce qui est crucial pour déterminer la validité en cas de contestation.

La rédaction d’un testament doit être claire et précise. Il est possible, même si rarement utilisé, de désigner un exécuteur testamentaire chargé de veiller à l’application des volontés du testateur.

  • La conservation du testament

Bien que le testateur puisse conserver son testament olographe chez lui, cette solution présente des risques de perte ou de destruction. En ce cas, il est conseillé, a minima, d’informer un proche de l’existence et de l’emplacement du testament.

Il est plus que fortement recommandé de confier son testament olographe à un notaire pour assurer sa conservation et son enregistrement au Fichier central des dispositions de dernières volontés. Ce fichier centralisé permet de retrouver facilement le testament après le décès du testateur, garantissant ainsi que ses dernières volontés seront respectées.

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  • La révocation et la modification du testament

Le testateur peut révoquer ou modifier son testament à tout moment, tant qu’il est vivant et en capacité juridique. Les modifications peuvent être apportées par un codicille, un document additionnel qui précise ou modifie certaines dispositions du testament initial, ou, plus simplement, par un nouveau testament qui précise qu’il annule le précédent.

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Le rôle du notaire

La rédaction d’un testament est un acte de prévoyance qui doit offrir tranquillité d’esprit et sécurité juridique.

Les héritiers ou les personnes intéressées peuvent contester un testament s’ils estiment qu’il a été rédigé sous la contrainte, l’influence, par un tiers, si le testateur n’était pas en capacité juridique ou qu’il ne respecte pas la loi. Il est néanmoins extrêmement difficile de contester un testament authentique. En cas de litige, c’est le tribunal qui tranchera la validité du testament.

Le notaire joue donc un rôle crucial dans la rédaction et la conservation du testament. Il conseille le testateur sur les dispositions à prendre et s’assure du respect des formalités légales.

En rédigeant un testament authentique, le notaire garantit la validité juridique du document. Il s’assure que le testateur est capable juridiquement de rédiger un testament et que ses volontés sont exprimées de manière claire et non équivoque.

Le notaire, en tant que professionnel du droit, peut anticiper et prévenir les sources potentielles de litiges entre héritiers. Il s’assure que les dispositions testamentaires respectent les droits des héritiers réservataires et sont conformes à la législation en vigueur.