25 personnes composent le comité d’organisation, car à Quai des Bulles, les prises de décisions sont collectives. « Sur les 25 personnes, on peut compter un tiers d’auteurs, de créateurs, de dessinateurs. Et puis il y a les passionnés, les Malouins » indique Nicoby, auteur de Bd également co-directeur artistique. Une organisation collégiale qui s’est mise en place au fil de ces 40 années d’existence.
1981 – 2021
Né au printemps 1981, « c’était d’abord un rendez-vous BD très confidentiel » rappelle Nicoby. Né sous l’impulsion de Jacques Plouët, un Malouin passionné de BD, et de la rencontre avec Jean-Claude Fournier (l’auteur de Bizu et de quelques Spirou & Fantasio), ce rendez-vous a bien grandi. Le festival s’installe au Palais du Grand Large, puis, après avoir été quelque temps intégré à l’autre événement littéraire malouin « Étonnants Voyageurs », le festival reprend son autonomie et se nomme en 1995 « Quai des Bulles ». Au cadre magnifique face au fort National et la plage du Sillon, s’ajoute la convivialité. Ce doux mélange fait tout l’attrait et l’intérêt de ce rendez-vous d’automne pour les auteurs comme pour le public. Quai des Bulles est aujourd’hui le 2e grand rendez-vous de la BD en France (après Angoulême).
Édition 2021
« Pour cette édition 2021 nous proposons une formule un peu réduite », rappelle Anne-Claire Macé, plasticienne et co-directrice artistique, « avec 500 auteurs présents au lieu de 700 et 120 éditeurs contre 160 habituellement. Ce festival est toujours un moment fort, c’est un moment de retrouvailles quand on fait ce métier assez solitaire d’auteur, de scénariste, de dessinateur… Et puis Saint-Malo… quel décor de fou ! Bien sûr ils adorent venir ! Avec en plus la convivialité, car c’est l’ADN de ce rendez-vous, et dès son origine. » Un cocktail parfait pour buller ensemble, avec le public, ces mordus de BD, passionnés et fidèles.
Engouement pour la BD
Économique, politique, érotique, scientifique, humour, jeunesse, aventure, thriller… tous les thèmes sont abordés aujourd’hui en BD. « Avec une réelle qualité artistique en France, une exigence. Il y a depuis longtemps en France des magazines, des publications, des dessins de presse, cela fait partie de notre culture. Ce mix de textes et d’images est très porteur actuellement et l’engouement pour la BD perdure. La qualité de « l’objet BD » est aussi un atout, c’est un travail très soigné, un véritable objet artistique propice aux collections. »
Demain le festival ?
« Nous ne ferons pas un festival plus grand. C’est à la taille de la ville. Cela nous permet de garder cette proximité avec le public et cette convivialité qui nous est chère. En revanche nous allons travailler sur la diversité : ouvrir un milieu Manga par exemple, qui ne s’est pas encore développé, car personne n’était porteur de ce style dans le comité d’organisation. Nous souhaitons développer les nouvelles technologies également, à l’image de l’exposition virtuelle « Bas Les Masques » que nous avons réalisée lors de la fermeture Covid, expo que l’on peut visiter en ligne. Pourquoi pas mélanger les arts également, comme cette année avec l’accueil de comédiens dans les allées du salon. Développer les partenariats, comme ce qui a été fait avec l’école de design de Saint-Malo aussi pour exposer leurs affiches dans les rues de Saint-Malo. »
L’économie de la BD
Début 2021, l’institut GFK révèle la dynamique exceptionnelle de l’univers de la BD en France dans une étude de marché : en 2020 les Français ont acheté 53,1 millions d’exemplaires de bandes dessinées, soit une croissance de + 9 % en 1 an. En chiffre d’affaires, le bilan est également positif : 591 millions d’euros de CA, soit + 6 % en 1 an. Un livre sur cinq acheté en France est une bande dessinée.
Beaucoup d’auteurs de BD sont des smicards !
Si les chiffres des ventes de bd s’envolent et que l’engouement ne se dément pas, les auteurs, dessinateurs, et coloristes, n’en sont pas les premiers gagnants. Mis à part quelques grands noms qui font une bonne part des ventes, la moitié des créateurs gagnerait en effet moins que le SMIC. « C’est compliqué de vivre de ses productions, je dirai qu’en moyenne un créateur se fait 700 euros par mois, sans congés payés, sans chômage, les conditions sont difficiles. Un auteur gagne entre 7 à 13% du prix d’un livre (disons 1 euro sur une bande dessinée à 15 euros). C’est un système un peu spécial : l’auteur touche des avances sur droit de son éditeur, et quand le livre est mis en vente il rembourse ses droits avant de toucher une rémunération, en fonction des ventes… Il faut améliorer ce statut de créateurs de BD. »
Palmarès 2021
Le festival Quai des Bulles décerne six prix. Si le prix Jeunesse Ville de Saint-Malo est remis en décembre, les lauréats des 5 autres prix pour cette 40ème édition on été dévoilés lors du festival :
Grand Prix de l’affiche : Ralph Meyer
C’est donc lui qui dessinera la prochaine affiche du Festival Quai des Bulles ! Ralph Meyer est notamment connu pour avoir dessiné la série Undertaker (éditions Dargaud, scénario Xavier Dorison et mise en couleur Caroline Delabie). Une série western à succès, de 11 tomes, racontant l’histoire d’un croque-mort en plein Far West.
Prix Coup de cœur : « Dans la tête de Sherlock Holmes »
Éditions Ankama. Cyril Lieron auteur et Benoit Dahan dessinateur. Premier tome paru en 2019 et deuxième sorti en septembre 2021. Cet ouvrage nous entraîne dans les méninges du plus célèbre détective londonien Sherlock Holmes. Au travers d’une enquête inédite, l’accumulation d’une centaine d’ indices constitue le véritable fil rouge de l’histoire, pour suivre ses incroyables conclusions.
Prix Ouest France : « Jours de sable »
De Aimée De Jongh (scénariste, dessinatrice et coloriste. Éditions Dargaud). La créatrice néerlandaise était présente cette année au festival comme ambassadrice de la bande dessinée aux Pays-Bas. Aimée de Jongh signe un récit inspiré de faits historiques, suivant l’histoire d’un journaliste photographe aux États-Unis dans les années 1930, relatant la misère des habitants touchés par un épisode de sécheresse et des tempêtes de sable.
Prix Jeune Talent : l’illustratrice Gessica Maio
Elle propose un univers ludique, coloré et foisonnant, propice aux fresques, aux affiches, aux revues. Elle a fait partie des auteurs ayant été en résidence en Bretagne, organisée par Les Petites Cités de Caractère de Bretagne et le festival Quai des Bulles au printemps dernier. Ce prix Jeune Talent est remis en partenariat avec le Crédit Agricole de Bretagne.
Prix Révélation ADAGP* : « L’Alcazar »
De Simon Lamouret (auteur et dessinateur. Éditions Sarbacane). Avec ce roman graphique, on se retrouve en Inde sur le chantier d’un immeuble en construction où coexistent une dizaine de personnages venus des quatre coins du pays. Portrait social, culturel et choral de l’Inde contemporaine.
*ADAGP : association de gestion des droits d’auteur