Couverture du journal du 12/04/2024 Le nouveau magazine

Patrick Malfait, Directeur général de Mégalis Bretagne

Mégalis Bretagne est une structure fédératrice des élus bretons, des 4 départements, de la Région et des 59 EPCI. Elle compte deux missions : le déploiement de la fibre optique et la digitalisation dans les collectivités bretonnes, avec une explosion des usages du numérique par celles-ci depuis le confinement dû au Covid-19.

Patrick Malfait - directeur général de Mégalis Bretagne

 

Patrick Malfait – directeur général de Mégalis Bretagne

Créé en 1999, le syndicat mixte Megalis Bretagne est aujourd’hui en charge de la construction et la gestion du projet Bretagne Très Haut Débit (hors zones AMII, soit 90 % du territoire), et du développement des usages du numérique par les collectivités. « Ce sont deux missions distinctes, à la maille régionale. Des projets extraordinaires à porter, avec cette force d’union de toutes les collectivités de Bretagne. Porter de tels projets c’est du même ordre que l’essor du ferroviaire, le déploiement de l’électricité ou des réseaux d’eau en d’autres temps. »

Bretagne Très Haut Débit (BTHD)

« La Bretagne devrait être entièrement fibrée d’ici à fin 2026. Nous souhaitons qu’avec ce réseau public, les Bretons et les entreprises aient ce même accès Internet à très haut débit, que ce soit dans les grandes villes comme en rase campagne dans le Poher. »

Un projet d’1,7 Md€, le plus gros chantier en France porté par des collectivités, après le Grand Paris.

–› 200 chantiers simultanés

Il s’agit d’un chantier multilocalisé, avec près de 200 zones en travaux simultanément, du pays d’Iroise au pays de Fougères. « Avec l’épisode Covid-19 quasiment tous les chantiers se sont arrêtés, ils vont reprendre progressivement à partir de fin avril. Cela concerne par exemple sur le terrain une centaine d’entreprises sous-traitantes sur les deux départements des Côtes-d’Armor et d’ Ille-et-Vilaine, cela se fait au cas par cas. Si le redémarrage est acté, la question reste la productivité, avec toutes les précautions à prendre sur les chantiers. On ne peut aujourd’hui évaluer le retard. Pour la partie bureau d’étude, cela a pu continuer en télétravail, avec une productivité de l’ordre de 35 % par rapport à la normale. »

–› Un projet à 1,7 milliard d’euros

Ce chantier d’ampleur est porté par un financement Région, EPCi et départements bretons « sur les 1,7 Md€ il y a 500 M€ qui viennent de recettes privées, des opérateurs FAI – les fournisseurs d’accès à Internet » soient Orange, Bouygues, Netensia, Ibloo.

« Nous avons pris 3 ans de retard par rapport l’objectif premier. En 2019, nous avons décidé d’accélérer le processus, signant avec le groupement Axione – Bouygues Energies. On passe en mode industrialisation de production pour les prises restantes. »

C’est le plus grand projet d’initiative publique jamais réalisé en France de déploiement de FttH (Fiber to the Home) « C’est très singulier, d’abord d’avoir fait le choix d’un réseau en co-propriété avec les collectivités. Ensuite que tout le monde soit raccordé en Bretagne : ce sera du 100 % FttH… avec l’habitat diffus en Bretagne, c’est parfois un coût important à + de 5 000 € la prise dans la zone la plus reculée, la dernière maison du dernier hameau au bout du chemin… C’est un choix politique, une question d’équité voulue par les élus, donner le droit à tous d’être raccordés à la même technologie. Et ce sera également le même prix à payer quelles que soient les communautés de communes, c’est une péréquation financière sur le territoire. Ce sont des choix audacieux, la puissance publique s’est mobilisée, et l’on ne retrouve pas cela partout en France. »

Développement et usages du numérique par les collectivités bretonnes

Mégalis Bretagne a également la mission de faciliter la transition numérique des collectivités bretonnes, vers le 100 % démat.

Acheteurs publics et entreprises disposent depuis 2006 d’une salle régionale des marchés publics, mutualisée et dématérialisée, « On embarque 2 000 entités bretonnes sur la plateforme Mégalis, c’est 95 % des parts de marché, 50 000 entreprises y sont connectées pour répondre aux offres. Bien sûr avec l’épisode Covid il y a eu moins de consultations. »

–› L’explosion de la visio

Mégalis Bretagne est ainsi aux côtés des collectivités, syndicats, mairies, des 59 EPCI de Bretagne, pour tout type de services dématérialisés connexes, notamment leurs échanges numériques : parapheur électronique, outils de signature à distance, télétransmission de documents avec la préfecture par exemple, services d’archivage, de visioconférence…

« Nous avions une offre de visioconférence depuis une dizaine d’années, mais là avec le confinement, il y a eu une explosion de l’usage par les collectivités, pour la tenue des bureaux communautaires par exemple. On a vu des pics de 240 connexions simultanées, là où nous étions à 50 avant. Nous avons également rapidement proposé un nouvel outil visio en ligne, avec le prestataire Cap Visio : une salle virtuelle pour des réunions à 50 personnes en simultané. »

–› Data & sécurité en ligne

« Nous mettons aussi en place un portail régional d’Open Data, pour mettre en commun des données des collectivités. » Déchets, eaux, transports, énergie… les thèmes sont légion et le nombre de collectivités bretonnes permettrait d’avoir un effet masse intéressant. Les adhérents devront définir ou prioriser les sujets à mettre en commun.

Quant à la gestion des risques numériques, RGPD, et Cyber attaques, « on travaille avec les directeurs généraux sur ces thèmes à risque, pour penser à une offre de service adéquat, d’ici le deuxième semestre 2020. D’autant que la période est propice à ce genre d’attaque. »

–› Télétravail

Le syndicat Megalis Bretagne compte 45 collaborateurs. « 99 % sont en télétravail pour cet épisode Covid19, c’était déjà dans nos habitudes. De manière générale, cet épisode de confinement a fait gagner 10 ans sur l’usage du télétravail, les appréhensions ont -par la force des choses- été levées. Il y a un équilibre à trouver. De même pour les échanges en visio, à distance, c’était un test grandeur nature, et cela devrait perdurer. Même si rien ne remplace le contact humain. »

Parcours

Patrick Malfait, 43 ans, est le directeur général de Mégalis Bretagne depuis janvier 2018. Originaire des Alpes, Patrick Malfait passe par les IEP -Institut des Études Politiques – de Grenoble et Paris, puis l’Institut National des Études Territoriales à Strasbourg, l’lNET, qui est le pendant de l’ENA pour la fonction publique territoriale. Il est aussi diplômé de l’IAE de Nantes, en Administration des Entreprises. « J’ai très tôt eu un goût pour la « chose publique » et de la politique, lisant les pages politiques des grands quotidiens. J’aime ce lien avec les élus, et être au coeur de la machine. Je suis toujours surpris et admiratif de leur engagement, au prix de sérieuses entorses à leur vie personnelle, c’est remarquable. Les accompagner et participer au développement de leur territoire est un réel plaisir. »

Que ce soit dans l’activité communale, départementale ou régionale, les postes dans l’administration territoriale sont à mi-chemin entre la sphère administrative et le monde politique. Particulièrement pour le poste de directeur général des services. « Dans nos métiers, on fait le tour de France des postes en fonction des opportunités et des échéances électorales ! ».

Son parcours commence à Nantes en 2000 comme chargé de mission à la direction des finances à la Ville, du temps de JeanMarc Ayrault ;

Retour à Grenoble en 2002, comme directeur de la gestion délégué de la ville sous Michel Destot ;

Puis 5 ans à Lyon avec Gérard Colomb, à la direction des affaires juridiques et des achats « c’était le temps des grands travaux d’aménagement des berges du Rhône » se souvient-il ;

En 2009 il arrive à Vannes en Bretagne « pour des questions de rapprochement familial notamment ». Il est DG de l’Agglomération de Vannes avec François Goulard, qu’il suivra quand celui-ci prend la présidence du Conseil Départemental du Morbihan en 2012, il occupe alors le poste DGS pendant 6 ans ;

En janvier 2018 il prend le poste de directeur général du Syndicat mixte de coopération territoriale Mégalis Bretagne, succédant à Hervé Le Norcy qui fait valoir ses droits à la retraite. « La place était libre, et j’ai eu envie de changer d’horizon. Après la commune, l’intercommunalité, le département, toucher la strate régionale est passionnant. »