Couverture du journal du 12/04/2024 Le nouveau magazine

Dossier : la rentrée du Tribunal Judiciaire de Rennes

L'audience solennelle de rentrée du tribunal judiciaire de Rennes a été marquée par l’installation de sa nouvelle présidente, Béatrice Rivail et un retour sur l’année écoulée. Le procureur de la République Philippe Astruc a fait état d’avancées notables dans la lutte contre les violences faites aux femmes. La première vice-présidente Dominique Ferali.

Tribunal judiciaire de Rennes

Tribunal judiciaire de Rennes ©Studio_Carlito

L’audience de rentrée s’est déroulée le lundi 17 janvier dernier en comité restreint en raison du contexte sanitaire. Seuls les deux chefs de cour, Frédéric Benet-Chambellan, procureur général, et Xavier Ronsin, premier président, ainsi qu’Éric Lemonnier, bâtonnier de l’ordre des avocats étaient présents. Dans son discours d’ouverture, la vice-présidente Dominique Ferali, a rappelé les difficultés de l’institution et précisé que « Non la justice n’est pas réparée et les moyens « rapides » qui ont été mis en œuvre ne suffiront pas à pallier la « pénurie chronique de ressources humaines et matérielles » et faire face aux « réformes multiples, conçues et menées dans l’urgence et l’impréparation », selon les termes employés par les magistrats de la Cour de Cassation. »

Activité pénale : 10 118 affaires poursuivables en 2021

Le procureur de la République Philippe Astruc a ensuite rappelé les principaux axes de travail développés en 2021 et qui se poursuivront en 2022. Et en premier lieu la lutte contre la violence faite aux femmes avec des chiffres encourageants dans la réponse judiciaire à ce fléau.

Violences faites aux femmes : « Nous gagnons sur le ‘chiffre noir’ »

Philippe Astruc s’est notamment réjoui du nombre de procédures reçues qui a plus que doublé passant de 916 à 1 972 « cela atteste que nous gagnons sur le « chiffre noir » des faits non révélés en créant un environnement plus favorable aux victimes. » Le taux de classement sans suite a également diminué, passant de 49,45 % à 37,88 %. Le nombre de stages de responsabilisation des conjoints violents qui constitue la réponse minimale dans ce domaine a pratiquement été multiplié par 6 passant de 102 à 580. Le nombre de transfert du commissariat vers le palais de justice pour réponses immédiates a été multiplié par 3 passant de 103 à 334. L’équipement en « téléphones grave danger » et « bracelets anti-rapprochement » progresse, mais reste encore assez limité.

Le procureur a toutefois rappelé que cette politique pénale très incisive n’était pas sans peser sur l’administration pénitentiaire qui doit désormais prendre en charge 130 détenus pour ce motif et plus de 400 condamnés dans le cadre du milieu ouvert. « Le suivi de cette population pénale, et la détection des risques de nouveaux passages à l’acte constitue un enjeu de taille que nous nous employons (…) à relever notamment par la mise en place d’une grille d’évaluation de la dangerosité spécifique qui nous permet d’identifier les situations les plus préoccupantes. » En 2021 un féminicide est à déplorer sur le ressort.

Stupéfiants : sur le seul « point de vente » de St-Jacques de la Lande 46 trafiquants identifiés en 2021

La politique menée contre la drogue veut à la fois responsabiliser les usagers afin de peser sur « la demande » et lutter contre les trafics pour contrarier « l’offre ». En 2021, 1221 verbalisations pour usage ont été dressées. Côté dealers, l’accent a été mis ces derniers mois sur les trafics dans les halls d’immeubles. Le procureur a rappelé la difficulté de la tâche au vu du nombre de personnes pouvant s’adonner à cette activité sur un point de revente « Si je prends comme exemple celui qui a dramatiquement défrayé la chronique en 2021 de Saint-Jacques de la Lande, ce n’est pas moins de 46 trafiquants qui ont été identifiés cette année sur ce point de revente, dont 10 ont été incarcérés, 11 judiciairement interdits de paraître et 7 demeurent à juger. Je vous laisse faire le compte s’agissant des quelques dizaines de points de revente que nous devons traiter sur Rennes. »

1 354 défèrements à Rennes en 2021, un record

« Nous avons conduit de front ces deux politiques pénales en matière de violences conjugales et de lutte contre les stupéfiants de manière très incisive en multipliant les ponses pénales et notamment au travers d’une politique de défèrement jamais atteinte à Rennes. Ils ont été en 2021, de 1354, soit plus de 100 par mois ou de 3 par jours, alors qu’ils n’étaient en 2017, pour donner un repère, que de 877 » a tenu à souligner le procureur de la République.

Aujourd’hui le centre pénitentiaire de Rennes-Vezin compte 752 détenus, pour un taux d’occupation de 131 %.

L’amende forfaitaire délictuelle principalement traitée à Rennes

Lundi 10 janvier, Emmanuel Macron a proposé de généraliser les amendes forfaitaires délictuelles pour les délits sanctionnés par des peines inférieures à un an de prison, comme c’est le cas par exemple pour l’usage de stupéfiants. Suite a cette annonce, il apparaît qu’une partie non négligeable de la réponse pénale en France passera par le parquet de Rennes, qui a la charge du Centre national de traitement (CNT) « Cette perspective constitue donc pour nous un enjeu d’une particulière importance qu’il nous faut anticiper à tous points de vue » alerte le procureur de la République. À l’antenne du parquet du CNT, 57 000 délits ont été traités en 2019, 120 000 en 2020 et plus de 230 000 en 2021.

Évoquant les états généraux de la Justice, le procureur a appelé de ses vœux la création de parquets départementaux et la possibilité de passage pour un temps défini de l’avocature vers la magistrature et inversement.

Magistrats et fonctionnaires départs et arrivées

3 départs

Ollivier Joulin parti à la retraite après cinq années et demie passées à la tête de la juridiction rennaise. Il a cependant gardé une activité juridictionnelle en devenant magistrat honoraire.

Alain Kerhoas après 3 années durant lesquelles il a présidé la JIRS puis assuré l’intérim d’Ollivier Joulin durant ces 4 derniers mois, part aujourd’hui rejoindre la cour d’appel de Rennes en qualité de Président de chambre.

Emmanuelle Bernier a passé 3 années à la tête du greffe de la juridiction. Elle a quitté la juridiction le 1er septembre 2021 pour le Secrétariat général du ministère de la Justice où elle occupe le poste de cheffe du département des ressources humaines et de l’action sociale au sein de la délégation interrégionale du secrétariat Grand-Ouest.

Les arrivées

Trois nouveaux magistrats ont été installés dans leur fonction, lundi 17 janvier, à l’occasion de l’audience solennelle de rentrée du tribunal de Rennes. Béatrice Rivail qui succède à Ollivier Joulin en qualité de présidente du Tribunal judiciaire de Rennes arrive de Privas (Ardèche), où elle exerçait également comme présidente. Elsa Bensaid, précédemment conseiller à la cour d’appel de Nancy, a été nommée 1er vice présidente. Marc Gelineau Larrivet, vice président TGI de Nanterre, est affecté au Centre National de Traitement en qualité de vice procureur. Yann Garcia-Audo, arrivé du Tribunal de grande instance de Lorient a été nommé directeur de greffe.

Ils sont arrivées en septembre dernier

  • François Touron nommé 1erVP chargé de l’application des peines
  • Mme Manon Lipiansky nommée vice présidente chargée du contentieux de la protection
  • Mme Marie-Line Pichon nommée vice présidente chargée de l’application des peines
  • Jérémy Mouchette, nommé juge d’instruction
  • Mme Adeline Pickeroen nommée juge d’instruction
  • Pierre Chuchkoff nommé vice-Procureur
  • Mme Chrystelle Vitre nommée vice-Procureure
  • Mme Alice Barbe nommée substitute

Retrouvez notre entretien avec Béatrice Rivail, nouvelle présidente du Tribunal judiciaire de Rennes