La startup, fondée en 2022, vient d’emménager dans ses locaux à Rennes. Les cartons jonchent encore le sol et une équipe de 8 personnes s’affaire derrière les écrans. Justine Bonnot est fière du chemin parcouru depuis ses travaux de recherche effectués pendant ses études. Déjà, la jeune femme buchait sur l’idée d’optimiser le code des applications embarquées pour réduire leur consommation énergétique. « Pendant ma thèse je me suis rendu compte que nombre d’appareils, comme les voitures, les robots, les drones pouvaient être conçus de manière beaucoup mieux optimisée. Aujourd’hui, nous ne pouvons plus nous permettre de gaspiller nos ressources avec des codes surchargés. Nous devons repenser nos méthodes et faire mieux.» Une intuition qu’elle a creusé tout au long de son parcours d’ingénieure sans jamais rien lâcher malgré les difficultés.
« plus de 100 milliards d’équipements connectés devraient être en circulation d’ici 2030 »
De la recherche à l’entrepreneuriat
C’est au laboratoire de recherche IETR Rennes que tout commence pour Justine Bonnot. Elle y trouve un précieux allié en la personne de son directeur de thèse, Daniel Menard, qui est profondément enthousiasmé par ses travaux de recherche. Convaincu du potentiel novateur de ses idées, il encourage vivement son étudiante à explorer les opportunités offertes par le monde industriel en lui suggérant notamment de rencontrer des dirigeants. Grâce à l’ouverture d’esprit et au soutien de son mentor, Justine Bonnot décide de franchir le pas et suis un programme, en cours du soir, pour lancer sa startup. Thèse en poche, et envie d’entreprendre chevillée au corps, elle candidate avec succès à un dispositif proposé par l’INRIA, destiné aux chercheurs souhaitant créer leur propre entreprise. « Il est crucial d’avoir le temps nécessaire pour peaufiner les choses. Le processus qui va de l’idée au produit fini prend énormément de temps. Pour preuve il aura fallu 4 ans entre mon premier démonstrateur et le produit commercialisable ». Le dispositif Inria Startup Studio lui permet ainsi de travailler son projet pendant 12 mois en touchant un salaire mensuel net de 2000 euros. En 2021, elle quitte l’INRIA pour se consacrer entièrement à sa startup, tout en jonglant avec un autre projet tout aussi important : l’arrivée de son fils Marcel. Mais le chemin de l’entrepreneuriat est semé d’embûche, et les fonds d’investissement ne se bousculent pas encore. « Mon directeur de thèse est vraiment ma bonne étoile sur ce projet. Il y croyait tellement qu’il m’a permis de signer un nouveau contrat de maturation technologique d’une durée de 9 mois. » C’est finalement Bouygues Telecom Flowers, la filiale de Bouygues Telecom, qui repère son projet, et le sélectionne dans le cadre de son programme de diversification Flowers, ce qui lui permet de lancer officiellement WedoLow en 2022.
Le défi du numérique consiste à faire plus avec moins
Traquer les lignes de codes superflues
La startup débarque sur un marché de plus en plus conscient de la nécessité d’un monde numérique responsable. En effet, notre quotidien regorge d’une multitude d’objets connectés : voitures, smartphones, appareils ménagers, drones, robots industriels, satellites… La liste ne cesse de s’allonger et les estimations sont à couper le souffle : plus de 100 milliards d’équipements connectés devraient être en circulation d’ici 2030. Mais avec cette multiplication d’appareils vient une dépense énergétique colossale, qu’on ne sera peut-être bientôt plus en mesure d’assurer. « Avec la crise des composants électroniques et les enjeux énergétiques et environnementaux que nous connaissons, le défi du numérique consiste à faire plus avec moins », martèle Justine Bonnot. C’est là qu’intervient WedoLow. La startup propose de diagnostiquer et d’optimiser les logiciels pour diminuer leur consommation énergétique. En traquant les lignes de code superflues, elle réduit les besoins en énergie tout en améliorant les performances. Et les résultats sont bluffants : les robots peuvent bénéficier de gains allant jusqu’à 60% sur la consommation d’énergie, d’une empreinte mémoire améliorée de 30%, et d’une vitesse d’exécution augmentée de 95%.
L’optimisation logicielle s’impose à tous désormais
Une réponse concrète pour les industriels
Les premiers clients ne se font pas attendre, certains à l’international.« L’optimisation logicielle s’impose à tous désormais, de la startup au grand groupe, de l’opérateur aux intégrateurs, à leurs équipementiers et prestataires», constate Justine Bonnot. « La solution d’hyper-optimisation de WedoLow permet de rendre visible les aspects qui ne le sont pas facilement lorsqu’il y a des milliers de lignes de code. Elle fonctionne comme un audit du code et fournit aux équipes de développement des pistes d’améliorations possibles, des gains potentiels ainsi qu’une application optimisée ». Pour exemple, ce client de WedoLow, qui utilisent des robots en fonds marins possédant une autonomie de 30 jours : « pour recharger les batteries, c’est une grosse opération, car il faut les extraire de l’eau. En décortiquant le code et en appliquant nos techniques d’automatisation, cela a permis d’économiser 75% sur le temps d’exécution des robots et 60% sur la consommation d’énergie. C’est énorme, cela a un vrai impact. » Justine Bonnot veut constituer rapidement une équipe d’une trentaine de personnes et vise un chiffre d’affaires de 5 millions d’euros d’ici à 3 ans.
La boite à questions
Une innovation qui vous a marqué : Le vaccin Covid est pour moi la meilleure innovation, et de loin, sur ces dernières années. Nous avons été touchés de façon très proche par cette maladie avant que les vaccins n’aient été développés, et je pense qu’il faut apprécier la chance qu’on peut avoir en y ayant accès aujourd’hui.
Que pensez-vous de Chat GPT : C’est beaucoup de bruit ! Mais l’IA est utilisée depuis longtemps dans de nombreux domaines de pointe.
Une appli dont vous ne pourriez pas vous passer : Deezer ! J’adore la musique.
Un Mantra : « Derrière chaque grande femme, il y a un grand homme ». Sans mon mari, je ne pourrais pas faire ce que je fais aujourd’hui professionnellement !
Que vouliez-vous faire petite : Pilote de ligne. J’ai passé le concours deux fois. La seconde fois j’étais parmi les 90 finalistes sur les 1500 candidats, mais cela n’a pas suffi pour intégrer les 30 places disponibles. J’ai été très déçue sur le moment, mais avec le recul je suis très heureuse d’avoir échoué !
Une passion : courir cela me permet de décompresser et j’ai hâte d’emmener mon fils avec moi.
Une musique : Enjoy the silence de depeche mode
Une personnalité : le chanteur de depeche mode (rire) je l‘ai même cité dans mes remerciements de thèse !