Doué d’un sens inné de l’observation et d’un excellent coup de crayon, Mathurin Méheut (1882-1958) dessinait sans relâche. Pour Mylène Allano, conservatrice du musée, « son crayon était le prolongement de sa main qui était elle-même le prolongement de ses yeux ». Mathurin Méheut a laissé une œuvre si riche et si variée, du dessin au grand panneau de décor, qu’elle donne lieu chaque année à une exposition thématique. Le choix s’est porté cette fois sur « la mémoire du geste » avec en écho des créations contemporaines : celles du brodeur Pascal Jaouen, de Violaine Biet, artiste textile, de Lucien Mazé, tailleur de pierre, de Martine Hardy et Servane Crespel, céramistes.
Beauté et sûreté du geste
Fils d’artisan, Mathurin Méheut a toujours été sensible à la beauté et à la sûreté du geste, à l’ingéniosité de l’outil. Au fil du temps, il a réuni un important corpus de dessins et de croquis d’artisans au travail, de la fileuse au sabotier, du tonnelier au goémonier, saisis sur le vif de son trait puissant. Conscient des mutations de la société bretonne et de la valeur patrimoniale de certains modes de vie traditionnels, il voulait conserver « la mémoire du geste ». L’artisanat rural relevait alors des arts et traditions populaires. Aujourd’hui, ce savoir-faire est revalorisé et la matière brute a acquis ses lettres de noblesse. Associées aux dessins de Méheut, les créations contemporaines montrent à la fois une permanence et une évolution des gestes et des matières.
Violaine Buet, artiste du textile « algué » à Gâvres (56)
Mathurin Méheut a observé de près le travail des goémoniers qui récoltaient le varech pour en faire du combustible et des engrais agricoles. Violaine Buet en fait une matière textile, une sorte de cuir végétal qui peut être coloré, tissé en macramé, cousu, imprimé, brodé.
Pascal Jaouen, styliste à Quimper (29)
La broderie bigoudène émerveillait Mathurin Méheut : richesse des motifs en fil de soie, finesse des points, éclat des couleurs. Brodeur hors pair, Pascal Jaouen a perpétué ce savoir-faire dans son école fondée en 1995 à Quimper. Ses créations relèvent de la haute couture !
Lucien Mazé, sculpteur et tailleur de pierre à Créhen (22)
Dans les carrières de Bretagne, Mathurin Méheut a représenté tailleurs de pierre et ardoisiers. Petit-fils de tailleur de pierre, Lucien Mazé a su tirer parti des particularités de l’ardoise, à la fois solide et fragile avec son aspect feuilleté. Ainsi a-t-il créé un œuf de 300 kg à partir d’un feuilletage de fines ardoises dont les nuances de gris se révèlent à la lumière !
Martine Hardy et Servane Crespel, céramistes
Sur le marché de Lamballe, à la grande foire de Montbran puis à Saint-Jean-La-Poterie dans le Morbihan, Mathurin Méheut a croqué les gestes des potiers à chaque étape de la création. La forme la plus rudimentaire : le bol et le pot deviennent, sous les doigts de Martine Hardy, des sculptures modelées à la plaque et au colombin, dépourvues de fonctions utilitaires en raison de leur formes pleines. Les épis de faîtage en céramique sont encore présents dans les Côtes d’Armor. Servane Crespel, céramiste à Hénanbihen (22) s’est inspirée d’un dessin de Mathurin Méheut pour réaliser une poterie à l’occasion de l’exposition. Belle illustration de cette « mémoire du geste » !
Musée Mathurin Méheut, Haras de Lamballe, Place du Champ de Foire, 22400 Lamballe-Armor. Exposition « La mémoire du geste « du 8 avril au 30 septembre 2023. Du 8 juillet au 25 août : ouvert le lundi de 14 h à 18 h et du mardi au dimanche de 10 h à 18 h. Du 26 août au 30 septembre : le lundi de 14 h à 19 h, du mardi au samedi de 10 h à 12 h 30 et de 14 h à 18 h, le dimanche de 14 h à 18 h. Renseignements 02 96 31 19 99. Billetterie en ligne : www. musee-meheut .fr