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Audrey Louail, présidente de CroissancePlus : « Je veux défendre l’idée d’une société entrepreneuriale moderne, sociale et durable »

Présidente de l’association nationale CroissancePlus depuis juillet dernier, Audrey Louail compte bien défendre les intérêts des entreprises françaises au plus haut niveau gouvernemental. L’entrepreneure d’Arradon (Morbihan) détaille sa feuille de route et ses priorités pour ce mandat de deux ans. Entretien.

Audrey Louail, présidente de l'association CroissancePlus

Audrey Louail, présidente de l'association CroissancePlus ©DB-7Jours

Vous avez pris la présidence de CroissancePlus pour porter la voix des chefs d’entreprises au niveau national. Pouvez-vous nous préciser quel est le but de cette association ?

Audrey Louail : CroissancePlus est une association apolitique qui fait du lobbying auprès des instances nationales pour défendre l’entrepreneuriat et peser sur les orientations économiques. Nous représentons environ 500 entrepreneurs de TPE et PME françaises et agissons de manière tout à fait transparente. Pour nous le terme lobbying n’est pas un gros mot, car nous privilégions la discussion avec toutes les instances décisionnaires. Et, oui, je veux défendre l’idée d’une société entrepreneuriale moderne, sociale et durable dans laquelle nous partageons les fruits de la croissance. Et c’est le modèle que j’essaie de défendre avec le comité directeur de CroissancePlus depuis plus de 8 ans, déjà. Une vision qui semble partagée par la majorité des adhérents, car on m’a proposé la lourde tâche d’assumer la direction pendant deux ans. C’est un challenge extrêmement intéressant qui m’oblige à sortir de ma zone de confort et dont les enjeux pour l’économie sont énormes.

« 75% des dépenses numériques sont américaines alors qu’il y a de très bons acteurs sur le sol européen et français. C’est totalement inadmissible. »

Quelles ont été les idées-forces de votre candidature à la présidence de CroissancePlus ?

A.L.: Lors de la présentation orale de ma candidature, j’ai défendu deux idées-forces : la souveraineté et les territoires. Les deux notions étant intimement liées, bien évidemment. Je défends l’idée de souveraineté nationale, car nous pouvons constater que depuis quelques années et encore plus depuis le Covid, les grandes puissances se referment sur elles-mêmes. C’est le cas notamment de la Chine et des États-Unis.

Nous devons absolument diminuer notre dépendance vis-à-vis de ces géants. Et, je ne citerai qu’un exemple dans un domaine que je connais bien, 75% des dépenses numériques sont américaines alors qu’il y a de très bons acteurs sur le sol européen et français. C’est totalement inadmissible. Et pour mettre en avant la « préférence nationale », nous avons proposé au gouvernement d’établir un indice de proximité dans les appels d’offres. Pourquoi pas OVH plutôt que Google? Une commission dédiée travaille actuellement sur l’application légale de cette préférence nationale et pour remettre en visibilité les acteurs français en capacité de réaliser ces services.

Que pensez-vous de l’état actuel de la France en matière économique? Les décisions du gouvernement vont-elles dans le bon sens ?

A.L.: Industrialisation et souveraineté semblent être les points faibles de notre pays. Durant de nombreuses années, on s’est désintéressé de l’industrie et parfois pour des raisons incongrues. On sent aujourd’hui l’amorce d’un mouvement inverse avec enfin un solde de relocalisation positif par rapport aux délocalisations, mais aussi le « made in France » plébiscité. Même si nous ne sommes pas toujours enchantés par les décisions du gouvernement, on va dans le bon sens. Il nous semble important de traiter les thèmes de la formation professionnelle et continue, de l’emploi des seniors, de la retraite. Mais là n’est pas l’essentiel.

Quel est l’essentiel alors ?

A.L. :La baisse des impôts de production est, selon moi, le véritable nerf de la guerre. Le gouvernement actuel va dans le bon sens, mais ses décisions ne font que nous placer (enfin) dans la moyenne mondiale. Ce n’est pas suffisant. Je dois avouer qu’en septembre, quand Elisabeth Borne a annoncé le report de la promesse de campagne du président de baisser les cotisations des entreprises, nous n’étions pas très contents. Nous avons absolument besoin de cette réforme !

« Le gouvernement doit taper du poing sur la table pour défendre ses intérêts et ses entreprises. »

La hausse des salaires ne fait-elle pas également partie de l’équation ?

A.L. : Je suis pour le partage des fruits de la croissance et la proposition de dividendes pour les salariés semble aller dans ce sens. Concernant la hausse des salaires, c’est quasiment obligatoire et nous l’avons déjà fait. Chez CroissancePlus, par exemple, 60% des adhérents ont augmenté les salaires entre 3 et 5%, et 30% au-delà. Mais ces hausses ne doivent pas hypothéquer l’avenir… Dans ce contexte de renchérissement du coût de la vie et de perspectives économiques troublées, les entrepreneurs de CroissancePlus ont à cœur de trouver le bon équilibre entre le nécessaire partage de la valeur actuelle et la sauvegarde de ce qui permettra de créer la richesse demain. 

Comme voyez-vous l’avenir proche avec la hausse des prix de l’énergie ?

A.L.: Début 2023 sera décisif. Il y a des aides pour les grands groupes et les TPE, mais pas grand-chose pour les PME. C’est une vraie inquiétude surtout quand on évoque un prix du KwH parfois multiplié par 50. Le gouvernement doit taper du poing sur la table pour défendre ses intérêts et ses entreprises. Il faut faire comme l’Espagne et le Portugal en sortant du traité européen sur l’électricité.

Il faut décorréler le prix de l’électricité du marché. J’aimerais également souligner un point actuellement très anxiogène pour les entreprises : la lenteur des banques à accorder des prêts. On les sent particulièrement hésitantes et elles traînent des pieds… temporairement, durablement ? Peut-être attendent-elles les défaillances…

Le parcours professionnel d’Audrey Louail en quelques mots

Audrey Louail, présidente de l'association CroissancePlus

©DB-7Jours

« J’ai commencé par des études en édition multimédia à la Sorbonne puis j’ai suivi l’évolution du digital et sa généralisation à travers différentes activités. J’ai d’abord édité des CD-Rom touristiques chez Hachette puis j’ai pris la direction de l’agence de communication digitale Churchill.

En 2007, avec mon mari nous avons repris la marque Ecritel en prenant d’énormes risques financiers avec un emprunt de 3,6M€ pour un CA à l’époque de 5M€. En 2008, nous sommes partis à Shanghai pour développer la marque Ecritel China et l’activité d’hébergement et d’infogérance. On s’est ensuite recentré sur la France, relevé les manches et on est passé de 50 à 250 salariés et un CA de 30M€. C’est ce parcours, pas toujours facile au demeurant, qui m’a donné envie de défendre l’entreprise et la prise de risques des entrepreneurs.« 

 

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