Couverture du journal du 03/05/2024 Le nouveau magazine

Conseil de prud’hommes : « L’objectif doit être le bon emploi »

Réuni en traditionnelle audience solennelle de rentrée à la cité judiciaire de Rennes, le conseil de prud’hommes a fait le bilan de l’année passé. Outre le manque criant de greffiers, la question des droits des salariés, et notamment le « bon emploi », a été le mot d’ordre.

Florence Laplanche, directrice des services de greffe judiciaires ; François Belloir, président du conseil des prud'hommes ; et Rémy Langlois, vice-président du conseil des prud'hommes, devant les greffiers. ©S.Se7Jours

Florence Laplanche, directrice des services de greffe judiciaires ; François Belloir, président du conseil des prud'hommes ; et Rémy Langlois, vice-président du conseil des prud'hommes, devant les greffiers. ©S.Se7Jours

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Il y avait foule lors de l’audience solennelle de rentrée du conseil de prud’hommes de Rennes (CPH), lors de laquelle le président, François Belloir, a été intransigeant quant aux différents changements mis en place par le gouvernement pour les salariés.
Et exprimant ses craintes face à deux projets à l’étude : ramener la durée d’indemnisation de 27 à 18 mois pour les chômeurs âgés de plus de 55 ans ; faire passer le délai de prescription pour agir en justice de 12 mois à 2 mois afin de contester un licenciement.
« Ces mesures ne créeraient pas d’emplois, pas plus qu’elles n’amélioreraient le maintien dans l’emploi. Le report injuste et brutal de l’âge de départ en retraite de 62 à 64 ans a déjà suffisamment compliqué la situation », a-t-il dit. Allant jusqu’à préciser, à propos de la diminution du délai de prescription : « En droit des contrats, les parties peuvent convenir d’un délai de prescription plus court, mais il ne peut jamais être inférieur à un an (article 2254 du Code civil). Cette mesure idéologique constituerait une violation manifeste du droit d’agir en justice. »

« En 2023, 836 affaires ont été traitées, sur un stock de 1 151 affaires »

©S.I7Jours

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836 affaires terminées en 2023

Malgré le contexte économique et social, les résultats sont « globalement bons », avec : un taux de conciliation de 20 % (contre 13 % dans les CPH de France), un taux de départage de 3,3 %, un taux de déclaration d’appel de 37 % et un taux de confirmation partielle ou totale par la cour d’appel de 80 %. « Au début de l’exercice 2023, nous comptions 1 104 affaires en stock. Au 31 décembre, il en restait 1 151, soit une augmentation de 4,3 % », précisait Rémy Langlois, vice-président du conseil. Parmi ces affaires, 836 affaires nouvelles ont été traitées. Durant cette même période de 2023, 881 saisines ont été enregistrées contre 933 en 2022. Soit, une légère baisse 5,6 %. « Cette diminution s’explique par le fait qu’il y a eu 40 affaires nouvelles appartenant à une série en 2023 contre 135 en 2022 », a ajouté le vice-président.

Il est alors juste de redéfinir les contours d’un emploi décent. « L’objectif doit être le bon emploi plutôt que le plein-emploi précaire. Et force est de constater qu’il n’y a pas de bon emploi sans salaire décent. » Rappelant également que le gouvernement devrait en priorité « lutter contre la pauvreté et les inégalités. Baisser le chômage oui, mais sans chercher sans cesse à rogner sur les droits des salariés ou des personnes en migration. La loi immigration est une grave atteinte aux valeurs de solidarité et de fraternité ». Un constat simple pour François Belloir, qu’il n’a pas manqué de partager : « Les entreprises où les marges sont suffisantes doivent aller plus loin dans les augmentations de salaire en raison de l’inflation toujours élevée et des difficultés qu’elles ont à recruter. »

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Manque d’effectif

D’ici à 2027, un effort budgétaire a été promis par le Gouvernement, impliquant la création de 61 postes de greffiers, dont 21 pour résorber les postes vacants. « L’augmentation des moyens budgétaires ne suffira pas, à elle seule, à lever les inquiétudes. Avoir une visibilité sur l’affectation et le remplacement, même temporaire, des personnels de greffe au sein des conseils de prud’hommes nous permettrait d’être davantage en anticipation sur ce type de problématique », précise François Belloir. Ces effectifs tendus « créent des tensions dans la gestion des personnels, pourtant volontaires et engagés, mais parfois fatigués et à la limite de l’épuisement », appuie le président du conseil.
Quant aux conseillers prud’homaux, au CPH de Rennes on en compte 98 sur les 114 prévus.