Couverture du journal du 02/10/2024 Le nouveau magazine

Écomusée de la Bintinais : le cuir, une matière à fleur de peau

Le cuir ne serait rien sans le savoir-faire des tanneurs et des mégissiers. Ce sont eux qui transforment la peau animale : bovins, porc, chèvre, mouton, agneau… en une matière imputrescible, à la fois souple et résistante. L’écomusée de la Bintinais, aux portes de Rennes, consacre une passionnante exposition à cette matière à fleur de peau, jusqu'au 1er septembre 2024.

Séchoir à peaux de la tannerie Brison à Rennes rue Francois Menez ©DR

Séchoir à peaux de la tannerie Brison à Rennes rue Francois Menez ©DR

Pierre Carrier-Belleuse, "Jeune femme ajustant son corset" 1893 ©DR

Pierre Carrier-Belleuse, « Jeune femme ajustant son corset » 1893 ©DR

Le visiteur est invité à un voyage dans les coulisses d’une industrie très présente à Rennes au 19e siècle, lorsque les tanneries vibraient au rythme de l’Ille et de la Vilaine, avant de péricliter dans les années 1920. L’occasion de découvrir les techniques et les outils utilisés, les secrets de fabrication (le tan, l’alun…) et l’art du cuir. L’exposition stimule tous les sens, elle donne à voir, entendre, sentir et toucher la matière.

Habillement, cordonnerie, ganterie, sellerie, bourrellerie, la maroquinerie, reliure, mobilier… le cuir est si présent dans notre quotidien que l’on oublie combien il est difficile de transformer une peau putrescible en matière noble. Du lavage dans la rivière au corroyage, le processus est complexe et éreintant, avec de nombreuses étapes : saler, sécher, laver, racler, tremper, épiler, écharner, tanner, assouplir. Les gestes ancestraux se sont transmis d’atelier en atelier, au fil de l’eau et des générations.

Rennes et ses tanneries le long de l’Ille et de la Vilaine

Présente dès la fin du Moyen Âge, l’industrie du cuir est ancienne en Bretagne, terre d’élevage, irriguée de rivières, riche du sel de ses marais salants. À Rennes, les tanneries étaient installées tout près du centre-ville, rue Baudrairie (corporation du cuir) et sur les bords de la Vilaine, dans les quartiers de la Parcheminerie, du Vieux Cours et de la rue Saint-Hélier. Jusqu’à ce que l’arrêté municipal du 25 septembre 1849 les oblige à quitter les lieux pour des questions de salubrité. Elles s’installeront dans les faubourgs de Rennes de Brest, de Saint-Cyr et surtout de Saint-Martin, rue des tanneurs.

Intérieur d'une tannerie à Rennes collection Musée de Bretagne ©DR

Intérieur d’une tannerie à Rennes collection Musée de Bretagne ©DR

En 1842, Édouard Leroux avait déjà fondé, le long de l’Ille, la tannerie Saint-Martin, ruelle du Moulin-Saint-Martin. En 1860, ses neveux, Alfred et Edgard Le Bastard – futur maire de Rennes -, en feront une puissante entreprise, concurrencée par la tannerie Zwingelstein, fondée en 1896 au moulin de Trublet, sur les bords du canal d’Ille-et-Rance. En 1909, cette dernière produisait le tiers des gros cuirs fabriqués à Rennes. Elle fut récompensée par une médaille d’or à l’Exposition internationale de Turin. Il est encore possible d’observer, à Rennes, quelques vestiges de cette industrie du cuir : le séchoir à peaux de l’ancienne tannerie Brison, rue François-Ménez, sur les bords de l’Ille et, non loin de là, les demeures des propriétaires des tanneries bâties au 19e siècle, rue Saint-Martin, comme celle du Parc des tanneurs.

Différents usages et métiers

Coffret en bois recouvert de cuir 17e siècle, écomusée de la Bintinais ©DR

Coffret en bois recouvert de cuir 17e siècle, écomusée de la Bintinais ©DR

Le cuir offre une expérience sensorielle, chaque fois différente suivant l’animal qui en est à l’origine. Voilà pourquoi Marie Pichard, commissaire de l’exposition, a tenu à constituer une matériauthèque présentant une trentaine d’échantillons de cuir à observer et à toucher. Une façon de mesurer le talent des compagnons et des artisans si habiles à transformer la matière en objets. Ici, un coffret de cuir du 17e siècle rehaussé de dorures, là, une calèche avec sa capote en cuir, une malle, un nécessaire de toilette, des étuis à couteaux ou à lunettes, des ceintures, des bottines. Mais aussi les vêtements les plus variés, du corset de cuir lacé par une jeune femme peinte par Pierre Carrier-Belleuse en 1893, jusqu’à la Haute couture, sans oublier le blouson perfecto des motards. Inventé en 1928 par Schott aux États-Unis, ce blouson noir devient un signe de ralliement dans le film L’Équipée sauvage, avec Marlon Brando, en 1954.

À la fin du parcours, le visiteur est invité à se glisser dans la peau de l’animal au travers de costumes étonnants, comme celui du « Krampus », créature anthropomorphique du folklore d’Europe de l’Est. On se rend compte alors que le cuir est comme une seconde peau.

 

Cuir, une matière à fleur de peau, du 24 novembre 2023 au 1er septembre 2024. Écomusée de la Bintinais, route de Châtillon-sur-Seiche 35 200 Rennes.
Du mardi au vendredi, de 9 h à 12 h et de 14 h à 18 h, le samedi et le dimanche de 14 h à 18 h. Plein tarif : 4 euros, demi-tarif : 2 euros.
ecomusee-rennes@rennes-metropole.fr

Site internet : www.ecomusee-metropole.fr