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Noël Coypel (1628-1707), peintre du roi Louis XIV : première rétrospective à Rennes  

Noël Coypel, l’auteur des peintures du plafond de la Grand Chambre du Parlement de Bretagne à Rennes, a été un artiste majeur du Grand Siècle. Sa carrière au service de Louis XIV est exceptionnelle par sa longévité et la qualité de ses œuvres. Le musée des Beaux-Arts de Rennes lui consacre une grande rétrospective.

Les nymphes offrant une corne d'abondance à Amalthée, Versailles ©DR

Les nymphes offrant une corne d'abondance à Amalthée, Versailles ©DR

Artiste accompli, directeur de l’Académie royale de peinture et de sculpture (1695), Noël Coypel a participé aux chantiers royaux les plus prestigieux sous la régence d’Anne d’Autriche (1643-1651) puis sous le règne de Louis XIV (1651-1715). Il occupe une place de choix dans le patrimoine rennais. Le plafond du Parlement de Bretagne est l’un des plus beaux décors civils d’époque Louis XIV, épargné par l’incendie de 1994. Et Rennes possède la plus riche collection de peintures et de dessins de cet artiste, avec les châteaux de Versailles et le Trianon, partenaires de cette exposition-événement.

"Le triomphe de Minerve", tapisseries de la manufacture des Gobelins d'après un carton de Noël Coypel ©DR

« Le triomphe de Minerve », tapisseries de la manufacture des Gobelins d’après un carton de Noël Coypel ©DR

À bonne école, dans l’atelier de Charles Errard

La carrière de Noël Coypel ne débute vraiment qu’en 1645-1647, à son arrivée dans l’atelier de Charles Errard. À ses côtés, Coypel participe aux chantiers royaux du Louvre, de Fontainebleau, du Palais-Royal et du parlement de Paris. Des décors dont il ne reste rien. Voilà pourquoi le décor du Parlement de Bretagne, réalisé de 1656 à 1661, sous la direction d’Errard, est si précieux : splendeur des couleurs, noblesse des attitudes, puissance du modelé, virtuosité des drapés. Les deux artistes ont recours à l’allégorie pour figurer la justice sous tous ses aspects.

Quand l’Église et le Roi jouaient la carte de l’image

Au 17e siècle, l’Église joue la carte de l’image pour instruire les fidèles. Les sujets bibliques constituent le gros des commandes : grandes toiles destinées aux églises de Paris. Coypel peint le May de Notre Dame (1661) et décore la chapelle des Incurables (1663). Son style est inspiré des formes de l’Antiquité romaine. En 1663, La réprobation de Caïn après le meurtre d’Abel lui vaut l’entrée à l’Académie royale. Les chantiers royaux lui laissent ensuite peu de temps pour les tableaux religieux à l’exception d’une commande pour l’église des Chartreux, Le Christ et la Samaritaine (1683) et La Résurrection pour l’église des Jésuites de Rennes.

"Le Christ et la Samaritaine"par Coypel (1628-1707). Huile sur toile. Paris, église Saint-Merry. © COARC / Roger-Viollet

« Le Christ et la Samaritaine »par Coypel (1628-1707). Huile sur toile. Paris, église Saint-Merry. © COARC / Roger-Viollet

Dès 1661, Louis XIV confie aux meilleurs peintres de l’Académie le décor de ses palais. Coypel livre les tableaux des petits appartements du roi aux Tuileries, deux plafonds pour les Grands appartements de Versailles (1670-1680) et des peintures pour le Trianon comme Les nymphes offrant une corne d’abondance à Amalthée aux vives couleurs et aux détails exquis. Habile metteur en scène, Coypel excelle dans l’allégorie pour glorifier le roi. Il reçoit aussi commande de tapisseries. Fondée en 1661 par Colbert, la manufacture des Gobelins produisait les tapisseries et le mobilier destinés aux demeures royales. La fabrication des tapisseries nécessitait de grands modèles peints appelés « cartons ». Coypel en a exécuté huit pour la tenture des Triomphes des dieux (1684-1694) et quatre pour les Mois arabesquesen (1695). Nouveauté, il laisse plus de place à l’ornement qu’au sujet : décors d’architecture et de feuillages. Réhaussées de fils d’or, ces tapisseries de haute lisse à fond rouges, comme le Triomphe de Minerve, rencontrent un vif succès !

Une exceptionnelle vitalité

Portrait de la famille Coypel, peint par Coypel en 1690  ©DR

Portrait de la famille Coypel, peint par Coypel en 1690 ©DR

À 57 ans, Coypel se remarie avec Anne-Françoise Perrin, qui lui donnera quatorze enfants. Sa carrière prend un nouvel élan : cartons pour les Gobelins, fresque pour l’église royale des Invalides (1702), nomination à la tête de l’Académie royale en 1695, participation aux Salons de 1699 et de 1704 où il présente un choix de ses compositions anciennes et modernes : tableaux de chevalet tels Loth et ses filles conservé à Rennes et retable de La Résurrection, son ultime chef-d’œuvre.

Orchestrée par Guillaume Kazerouni, responsable des collections d’art ancien à Rennes et par Béatrice Sarrazin, conservatrice générale du patrimoine au château de Versailles, l’exposition fait la part belle aux peintures et aux tapisseries, aux esquisses, mais aussi aux dessins de nus que Coypel, en tant que professeur à l’Académie, exécutait pour ses élèves pour leur servir de modèle : dessins à la pierre noire, à la sanguine, à la plume, rehaussés de craie blanche pour donner des accents de lumière et marquer les volumes. Soucieux de défendre la doctrine académique en faveur de la primauté du dessin, Coypel prodiguait ses conseils aux artistes en herbe, en pédagogue attentionné.

Exposition du 17 février au 5 mai 2024.​​​

"Loth et ses filles", 1704, musée des Beaux-arts de Rennes ©DR

« Loth et ses filles », 1704, musée des Beaux-arts de Rennes ©DR

​​​Musée des Beaux-Arts, 20 quai Emile Zola à Rennes
Tous les jours de 10 h à 17 h, sauf le lundi.
« Catalogue Coypel, peintre du roi, » sous la direction de G. Kazerouni et B.Sarrazin, éditions Snoeck.
Autour de l’exposition : visites guidées, conférences  » Art et politique au temps du Roi Soleil  » par G.Kazerouni, ateliers de tapisserie, architecture à Rennes au 17e avec l’office du tourisme.