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Tribunal judiciaire de Rennes. Délais de jugement trop longs : le constat est « douloureux »

Le gratin du monde judiciaire rennais était réuni pour la traditionnelle audience de rentrée, autour de la présidente, Béatrice Rivail et du procureur de la République de Rennes, Philippe Astruc à la cité judiciaire. Avec, avant tout, la présentation de la nouvelle magistrate, Raphaèle Bail, arrivée le 2 janvier, nommée dans les fonctions de première vice-présidente en charge du pôle de l’instruction et d’un cabinet JIRS. La juridiction a ainsi dressé le bilan 2023, dont l'aggravation des délais de jugements.

Philippe Astruc, procureur de la République et Béatrice Rivail, la présidente du tribunal ©Studio Carlito

Philippe Astruc, procureur de la République et Béatrice Rivail, la présidente du tribunal ©Studio Carlito

Délais de jugement trop longs

©S.I7Jours

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En matière de délais, le constat est « douloureux », selon le tribunal judiciaire, avec des convocations devant le tribunal correctionnel, au terme des investigations, qui se situent actuellement entre janvier et juillet 2025, selon les types de procédures, soit entre 12 et 81 mois « Sauf s’agissant des procédures qui nécessitent un jugement immédiat. »

Pourquoi cette aggravation des délais ? « Alors que les capacités de jugement pénaux sont globalement stables depuis des années à Rennes, autour de 5 000 à 6 000 décisions par an, que le niveau de délinquance a globalement augmenté, il a fallu absorber une multiplication par trois des poursuites en matière de violences conjugales, tout en ayant un haut niveau de réponse en matière de trafic de stupéfiants et en répondant aux nombreuses infractions constatées en 2023 pendant de longs mois de conflit social », précise Philippe Astruc. Le bilan à la mi-avril, avant la fin des mouvements sociaux, était déjà de 108 réponses pénales, dont 51 déferrements.

Violences intrafamiliales

« Sans surprise, la protection des femmes demeure la boussole de ce parquet », a assuré le procureur de la République de Rennes, Philippe Astruc. Un haut niveau de réponse pénale s’est poursuivi en 2023 et « nous commençons à entrevoir une sorte de palier dans la dénonciation des faits avec une progression désormais plus lente ». La création, depuis le 1er janvier, d’un pôle spécialisé en matière de violences intrafamiliales « contribue à améliorer le traitement de ces procédures ».

Les dénonciations de victimes sont trois fois plus importantes qu’en 2019, avec presque 2 900 plaintes, soit huit par jour. « Avec un taux de classement sans suite de 34 %, nous restons à dix points en deçà de ce que nous connaissions en 2019. » Dans ce domaine, « l’interdit légal est posé avec clarté », précise Philippe Astruc, évoquant notamment 450 défèrements en 2023 en ce domaine et des moyennes de 256 hommes et 25 femmes incarcérés, (32 % de la population pénale masculine détenue).

Délinquance organisée

©DR

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La situation à Rennes reste difficile, avec une demande en stupéfiants forte, renforcée en post Covid, et une banalisation de l’usage de cocaïne, « ceci malgré l’intensité de notre action et un niveau de réponse pénale très élevé, avec à titre d’exemple ce jour, 347 personnes incarcérées à Vezin ». Une observation nouvelle : la zone rurale est davantage concernée que par le passé.

En matière de « règlements de comptes », le bilan est assez comparable à 2022, avec neuf faits (huit en 2022), mais deux victimes décédées contre une en 2022. « La stratégie demeure ici celle d’une mobilisation forte de moyens de police judiciaire pour obtenir un haut niveau d’élucidation, continue le procureur. Le bilan local est donc celui d’une certaine dégradation de la situation qui reste cependant en deçà de ce qui peut être constaté dans des métropoles comparables. »

Trois « thromboses » 

« J’ai déjà pu faire le constat de trois thromboses dans le cheminement de l’action pénale », évoquait Philippe Astruc. D’abord, au niveau des services d’enquête. Mais aussi concernant les services judiciaires, avec des capacités d’orientation par le parquet et de jugement insuffisantes, « des magistrats et greffiers supplémentaires nous sont promis d’ici à 2027. J’ai sollicité un renfort de trois magistrats pour un parquet qui en compte actuellement 22. »

Enfin, des manquements sont observés s’agissant des capacités de prise en charge par l’administration pénitentiaire : au centre pénitentiaire de Rennes-Vezin, 48 détenus en moyenne à l’année dorment sur un matelas par terre (pic à 70 en novembre) sur 698 détenus, soit un taux moyen de surpopulation de 119 %. « Je pense que l’ouverture programmée d’un autre établissement dans le Morbihan pourra renforcer les capacités pénitentiaires bretonnes. »

Des projets « brûlants »

Béatrice Rivail, présidente du tribunal, a évoqué les projets de l’instance en cours :

  • Développement du programme de la procédure pénale numérique. « Le but : une audience sans dossier, sans papier, à l’instar de nos voisins espagnols. »
  • La création d’un groupe de travail pour la mise en œuvre du pilotage de la juridiction par Pilot Audiencement, « il nous permettra de paramétrer les audiences et d’enregistrer les dossiers ».
  • Élaboration d’une convention avec les universitaires, pour « nos étudiants qui effectuent des stages dans les services de notre juridiction ».
  • Création d’une Maison de justice et du droit à Vitré
  • Développement de l’accès au droit avec le CDAD35