Le concept : optimiser la course retour à la voile
Lorient, au cœur de la Sailing Valley, a inauguré une nouvelle course transatlantique depuis la Martinique : Retour à la Base. Le principe est simple : après la transat Jacques Vabre, le retour des Imoca sera sportif et utile. « L’idée était de transporter un produit emblématique », témoigne Jean-Pierre Cau, président de Lorient Grand Large.
Le choix s’est porté sur le cacao, « car il a existé une production de cacao de grande qualité en Martinique, et la filière se reconstruit depuis 5 ans ». Les 32 bateaux concurrents ont ainsi rapporté 736 kg de cacao, « c’est près de 30% de la production totale de l’île ! »
Une énième opération marketing au service de la course au large ? « Pas du tout, et il ne s’agit pas d’écologie ou d’économie, mais de montrer que c’est possible et de créer quelque-chose ».
Le principe : décarboner le transport et accompagner les filières locales
L’aventure s’est faite avec l’entreprise Belco, qui travaille depuis 15 ans le café en développant des filières durables. « Nous accompagnons les producteurs locaux, réalisons l’import de café depuis 2007, et de cacao depuis un an, rappelle Louis Mayaud, en charge du transport maritime à faible émission de carbone chez Belco. Nous nous sommes lancés dans le transport à la voile il y a deux ans avec l’armateur finistérien Towt, qui a entamé la construction de son premier cargo à voile à Concarneau… Donc cette course Retour à la Base réunit nos ambitions : créer de la valeur, aider les petites productions de qualité, optimiser un transport plus direct et décarboné qui préserve le produit ».
Belco et ses clients torréfacteurs visent le marché du café dit de spécialité : des grands crus, notés et classés. « Nos produits sont plus chers que ceux de la grande distribution, mais 80% du prix revient aux producteurs. Le coût du transport passe de 15 à 30 centimes pour un paquet de 250 g. C’est ce qui rend ce système vertueux : on consomme moins mais mieux ! » Un modèle que Belco cherche à reproduire avec le cacao de Martinique, accompagnant la structuration de la filière, travaillant à l’amélioration de la fermentation de fèves de cacao. « Grâce à la course, nous lions un partenariat sur le long terme ».
Le résultat : un nouveau marché pour un nouveau produit
Les 736 kg de cacao de Martinique débarqués à Lorient vont être travaillés par Anne Caron, torréfactrice et meilleur ouvrier de France, pour devenir des tablettes de chocolat, disponibles au printemps 2024. « Le cacao de Martinique est de très grande qualité et très recherché, on peut relancer une filière avec cette opération. Cela correspond exactement à mon projet d’entreprise : valoriser les petits producteurs, les terroirs et les populations locales, créer de la valeur par le goût ». Cheffe d’entreprise, fille de torréfacteur et agronome, Anne Caron voyage régulièrement pour rencontrer les producteurs, et ainsi sélectionner des cafés d’exception. « Les cafés de spécialité représentent 4% des cafés importés en France » : un marché de niche mais porteur. « Le café est très proche du cacao, et le modèle est transposable. On pourrait imaginer du cacao de spécialité ». On voit d’ailleurs l’émergence des chocolatiers « bin to bar », qui préfèrent sélectionner les fèves plutôt que de se fournir en chocolat auprès d’industriels. Pour Lorient Grand Large, le concept sera certainement renouvelé, « il y a beaucoup de sujets à mettre en lumière grâce à la course au large ».