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Travail pénitentiaire à Rennes – Vezin : « Nous recherchons des clients »

Le Tour de France du travail pénitentiaire faisait étape à la prison pour hommes de Rennes-Vezin. Une trentaine d’entreprises bretonnes sont venues découvrir les ateliers de production de l’établissement. L’administration espérait bien en convaincre quelques-unes de faire appel au travail en détention, car les contrats manquent pour répondre à l’envie de tous les détenus volontaires.

Les personnes détenues travaillent de 8h à 13h30 avec 20 minutes de pause et sont payés 5,18 euros bruts de l’heure.©SB_7J

À Rennes-Vezin, 180 des 800 détenus travaillent, entre les ateliers de production, où sont réalisés du petit assemblage et du conditionnement, et le service général des auxiliaires, directement employés par l’administration pénitentiaire. Un chiffre encore bien loin des ambitions du garde des Sceaux, Éric Dupond-Moretti, qui souhaite « atteindre 50 % de personnes détenues bénéficiant d’une activité rémunérée d’ici 2027, contre 31 % aujourd’hui. » C’est tout l’objet du Tour de France du travail pénitentiaire lancé en avril 2023 afin d’inciter les sociétés et les partenaires à avoir recours au travail des détenus.

« J’ai une liste d’attente de 70 opérateurs »

Dans l’établissement rennais, une surface de 1200 m2 est répartie en 10 ateliers, opérés par la société Gepsa, prestataire multiservice spécialisé dans les milieux sensibles. Pour le moment, 60 détenus travaillent dans cette zone de production – qui a une capacité de 100 personnes – pour le compte de 8 entreprises clientes, majoritairement des contrats réguliers.

« Nous recherchons des clients. J’ai une liste d’attente de 70 opérateurs, commente Pascal Foucault, responsable du travail pour Gepsa. Nous faisons de l’assemblage de panneaux de signalisation, du conditionnement de compotes ou de chargeurs de box internet… Nous aimerions aussi aller sur des prestations plus techniques, de l’assemblage mécanique, par exemple. » Et d’insister : « Hormis les grilles, nous sommes un atelier comme un autre, avec les mêmes exigences. »

Hormis les grilles, nous sommes un atelier comme un autre, avec les mêmes exigences.

45% du SMIC

Pascal Foucault de Gepsa ©SB_7J

Pascal Foucault de la société Gepsa ©SB_7J

Le travail en prison présente plusieurs avantages pour les entreprises. À commencer par le coût : le seuil minimal de rémunération est à 45 % du SMIC. Concrètement, les détenus travaillent de 8h à 13h30 avec 20 minutes de pause et sont payés 5,18 euros bruts de l’heure.
« L’avantage économique est une réalité ; même si nous préférons mettre en avant la qualité de nos prestations, notre réactivité et l’aspect inclusif, car travailler est une vraie chance pour se reconstruire et les personnes détenues le savent », précise Pascal Foucault.

 

 

©SB_7J

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« Sur l’argent gagné, 20% sont prélevés pour indemniser les parties civiles, 10% pour une somme remise à notre libération. Le reste permet de cantiner, c’est-à-dire d’acheter de la nourriture ou des cigarettes », explique Franck, un détenu. Les détenus qui reçoivent, au titre de l’indigence, une trentaine d’euros par mois sont prioritaires à l’accès au travail.
« Travailler en détention permet d’acquérir des compétences. Dehors, certains n’avaient pas l’expérience de travailler. Cela donne un rythme », ajoute Franck.

Sur l’argent gagné, 20% sont prélevés pour indemniser les parties civiles, 10% pour une somme remise à notre libération. Le reste permet de cantiner.

« L’entreprise doit être proche du travail pénitentiaire »

Alain Monjaux, président de l’antenne bretonne du Conseil national des achats (CNA)

Alain Monjaux, président du CNA Bretagne ©SB_7J

Pour l’étape à Rennes-Vezin, une trentaine d’entreprises a répondu à l’invitation. « Des entreprises locales, principalement des TPE et PME, de tous les secteurs, venues pour les ateliers de production en détention ou pour la partie emploi à la sortie », indique Benoit Grannec, responsable relations entreprises dans l’administration pénitentiaire. Le fonctionnaire avait notamment convié Alain Monjaux, président de l’antenne bretonne du Conseil national des achats (CNA). « Je suis venu voir dans quelle mesure nous pouvons sensibiliser les acheteurs de Bretagne et travailler ensemble. Cela pourrait s’inscrire dans une politique de relocalisation, en se concentrant sur des prestations réalisées à ce jour par des pays tiers à bas coût de main-d’œuvre. »

 

Hervé Kermarrec ©SB_7J

Hervé Kermarrec ©SB_7J

Également présent, Hervé Kermarrec, président du Medef Bretagne, rappelle « l’importance d’être là. L’inclusion compte aussi les personnes sous main de justice. L’entreprise doit être proche du travail pénitentiaire, car il y a des besoins à l’intérieur des murs, mais aussi à l’extérieur, puisque les entreprises ont des capacités d’accueil de salariés en réinsertion. Le rôle du Medef est de faire connaître et inciter les entreprises à s’intéresser à ce qui se passe en prison et au travail pénitentiaire, qui reste peu connu. »

 

Pour prendre contact :
contact-travail.disp-rennes@justice.fr