Répondre aux besoins et aux défis de la société. Les entreprises ont depuis 2019 la possibilité d’inscrire dans leurs statuts la mission et les objectifs qu’elles s’engagent à poursuivre pour contribuer au monde de demain. Des engagements suivis par un comité interne et contrôlés tous les deux ans par un organisme tiers indépendant. Un garde-fou législatif pour garantir que l’entreprise ne s’écartera pas de la mission qu’elle s’est fixée.
Questionner son utilité dans la société
Une démarche réalisée par l’Agence Déclic, déjà très au fait de la responsabilité sociétale des entreprises, puisqu’elle accompagne depuis 2014 les entreprises dans leurs stratégies responsables. « Chaque entreprise a une raison d’exister. Elle adresse un marché, elle répond à un besoin. Avec l’entreprise à mission la notion de raison d’être va au-delà, elle questionne son utilité dans la société », précise Anne-Laure Simon, co-dirigeante de l’agence Déclic. « Cette raison d’être, la mission que l’entreprise s’engage à poursuivre, doit traduire à la fois qui elle est et ce qu’elle veut faire. Ensuite, il faut prendre des engagements qui viennent démontrer qu’on va atteindre sa mission. Ces engagements doivent être en lien avec des enjeux sociaux et environnementaux.»
Une raison d’être qui doit donc être clairement identifiée. Car il ne s’agit pas de faire un coup de pub. Inscrire sa mission dans ses statuts est contraignant et oblige à fixer des objectifs précis, d’ordre social et environnemental, propres à l’entreprise, et non réductibles au profit. La loi impose un double contrôle, en interne à travers un comité de mission incluant a minima un salarié et en externe par un organisme tiers indépendant.
S’inscrire dans son écosystème
Concernant le comité interne, même si cela n’est pas clairement exprimé par la loi, il est recommandé d’associer un certain nombre de parties prenantes: fournisseurs, clients, partenaires, pouvoirs publics, associations. Un choix d’ouverture fait par l’Agence Déclic « Nous avons opté pour un comité de mission sans dirigeants pour qu’il y ait une liberté de parole totale sur les orientations données dans l’entreprise. Il y a deux salariés, des clients, des partenaires, des fournisseurs et nous avons aussi des personnalités extérieures qui connaissent bien la RSE et qui peuvent nous challenger sur ces sujets. »
4 entreprises sur 5 ont intégré au moins une partie prenante externe dans la gouvernance de la mission.
100 entreprises pionnières ont déjà franchi le cap
L’ Agence Déclic fait ainsi partie des cent premières entreprises françaises a s’être transformée en société à mission avec comme ambition de « contribuer à rendre nos territoires plus performants et durables ». « Concrètement, au-delà de notre action auprès des entreprises et collectivités dans le sens du développement durable on intervient dans différents réseaux pour bouger les entreprises de notre territoire et aider à la mise en mouvement sur ces transitions sociétales », précise Anne-Laure Simon.
Des actions concrètes sur le territoire, donc. La dernière en date est la participation de l’Agence Déclic au projet de reconversion de la Brasserie Sant-Hélier à Rennes en Lieu des transitions. « On a rencontré Citédia pour créer au niveau de la brasserie un lieu qui incarne les transitions sociétales dans lequel les acteurs privés et publics pourront y trouver à la fois un lieu de restauration et de convivialité ouvert sur le quartier, une halle de 700 mètres carrés dans laquelle pourront être organisés des évènements, des séminaires, des conférences, des rencontres d’entreprises et un immeuble de bureau tertiaire qui va accueillir des entreprises qui contribuent à ces transitions sociétales », se réjouit Anne-Laure Simon.
Un engagement que l’Agence Déclic décline auprès de ses clients qui souhaitent à leur tour passer le cap « En général ce sont des entreprises qui ont maturé ces sujets-là depuis assez longtemps et qui voient dans l’entreprise à mission un outil de plus au service du projet d’entreprise, et un outil législatif. Nous avions jusqu’ici des leviers de type label, RSE… très utiles et complémentaires. Là, c’est un instrument supplémentaire pour aider les entreprises qui souhaitent s’engager dans cette voie. »
« Nous accompagnons des entreprises qui sont sur le chemin. On les aide à y voir plus clair. On les guide vers la meilleure option pour eux, en fonction de leur projet d’entreprise. Pour accomplir cette démarche, il est important de ne pas rester seul. Il faut échanger avec d’autres entrepreneurs et d’autres entreprises à mission, se questionner, rejoindre des réseaux qui réfléchissent à ces sujets-là. Il est nécessaire de prendre son temps. L’entreprise à mission est un outil qui peut être utile mais pas systématiquement », rappelle Anne-Laure Simon. « Actuellement nous accompagnons 4 entreprises, notamment le Groupe Réalités qui a franchi le pas le 14 janvier dernier. » Le maitre d’ouvrage inscrit ainsi dans ses statuts la mission d’ « Être utile, partout, tout le temps, au développement intelligent des territoires. »
À l’appui de cet engagement et des quatre objectifs sociétaux inscrits dans ses statuts, le Groupe Réalités s’engage à modifier ses règles de gestion et à apporter les preuves de l’atteinte de ses objectifs pour concilier but lucratif et intérêt général.
Il existe de nombreux réseaux. La communauté des entreprises à mission en premier lieu. En Bretagne il y a également des réseaux comme les Dirigeants Responsables de l’Ouest ou le Centre des Jeunes Dirigeants qui réfléchissent à ces notions de performances globales, au rôle de l’entreprise dans les sociétés au-delà de ses activités économiques.
Ces entreprises qui s’emparent des questions sociales, environnementales, qui recherchent des modes de production et de distribution plus responsables se rendent par ailleurs attractives auprès des futurs candidats comme le souligne la co-dirigeante de l’Agence Déclic « aujourd’hui, les gens cherchent du sens dans leur travail, ce qui est bien normal, on y passe 8 à 10 heures par jour ! Notre premier engagement dans la société c’est le travail qu’on fait. On a envie d’être utile, de mettre sa force de travail au service d’un projet dans lequel on se reconnait. L’entreprise à mission a le mérite de poser clairement son projet, de rendre public ce à quoi elle cherche à contribuer. Cela adresse à l’extérieur, et notamment aux futurs candidats et talents, une information très claire. Mais c’est aussi exigeant, car derrière il y a un devoir de cohérence de l’entreprise en interne et en externe sur tous ces aspects. »
* Source : Baromètre de l’Observatoire des Sociétés à Mission 2021 édité par la Communauté des Entreprises à Mission
Premier objectif des entreprises à mission : adresser des enjeux de transition
D’après le Baromètre de l’Observatoire des Sociétés à Mission, les entreprises qui se transforment visent des approches multiples. La plupart des sociétés à mission expliquent leur démarche par plusieurs enjeux majeurs. Celui qui remporte le plus d’adhésion est aussi le plus englobant : « Adresser des enjeux de transition (sociale, écologique, économique) » avec 36 % des réponses. Suivent en proportion similaire des enjeux plus précis : « préserver des écosystèmes naturels ou des biens communs », « consolider les relations avec l’écosystème » (chaîne de valeur, partenaires, clients, ONG…), « améliorer l’engagement des collaborateurs et la marque employeur » et « pérenniser des engagements » (face à des changements potentiels d’actionnaires / direction). « Protéger une ambition d’innovation » et « Créer un nouveau type de compétition » font pour l’instant peu partie des objectifs relevés par les répondants.