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local industriel : Comment réduire ses impôts locaux ?

En quelques mots, il existe deux grandes familles de bâtiments d’exploitation : les locaux industriels et les locaux professionnels. Précisons que pour les locaux répondant à la qualification commerciale ou industrielle, les modalités d’évaluation de l’immeuble à la Taxe foncière et à la cotisation foncière des entreprises (CFE) sont sensiblement différentes.

Charlène Meleuc, avocat au barreau de Rennes

Charlène Meleuc, avocat au barreau de Rennes ©DR

 

Pour certains bâtiments comme les magasins ou les usines, il est relativement simple d’en déduire la méthode d’évaluation de son local. La distinction peut être plus complexe pour un atelier ou un entrepôt par exemple… En effet, d’après la loi, revêtent un caractère industriel « les bâtiments et terrains servant à l’exercice d’une activité de fabrication … qui nécessite d’importants moyens techniques » ou à toutes autres activités « qui nécessitent d’importants moyens techniques lorsque le rôle des installations techniques, matériels et outillages mis en œuvre est prépondérant ».

La première étape consiste donc à vérifier puis à valider la méthode d’évaluation retenue pour votre local.

 À la suite d’une vague d’assouplissements des règles applicables aux locaux industriels, un examen minutieux des bases foncières peut générer une économie substantielle sur les deux impôts annuels que sont la Taxe Foncière et la CFE.

Quelles sont ces dispositions favorables ? Comment les détecter ? Comment obtenir un remboursement ?
Et pour finir, quelles sont les actualités 2023 ?

Quel dispositif pour mon entreprise ? Pour quel avantage fiscal ?

Pour un local industriel, le premier dispositif à vérifier est la bonne application de la réduction de 50 % de la valeur locative foncière instituée par la loi de finances pour 2021 :

 

Cette réforme a concerné 32 000 entreprises exploitant 86 000 établissements, ce qui représente une baisse annuelle de 1,75 Md€ de taxe foncière et de 1,54 Md€ de CFE.

La seconde opportunité réside dans la vérification de la bonne application de la jurisprudence du Conseil d’État du 11 décembre 2020 dénommée « GKN DRIVELINE » à l’assiette foncière du local.

Rappelons que sont soumis à la taxe foncière (et le cas échéant à la CFE), les terrains et agencements de terrain, les constructions et les aménagements faisant corps avec le bâti, ainsi que les installations destinées à abriter des personnes ou des biens ou à stocker des produits.

En revanche, sont exonérés de taxe foncière, les « biens d’équipements spécialisés ». De quoi s’agit-il ? Jusqu’à l’arrêt GKN, l’administration fiscale faisait une application très limitée de cette exonération et intégrait à l’assiette foncière tous les éléments qu’elle estimait indissociables des immeubles et/ou qui ne participaient pas directement à l’activité industrielle de l’établissement. Depuis l’arrêt GKN, une immobilisation est exonérée de taxe dès lors qu’elle est spécifiquement adaptée aux activités susceptibles d’être exercées dans un tel établissement industriel. Le critère de la dissociabilité a été abandonné, tout comme celui de la participation directe à l’activité industrielle.

Il est dès lors possible d’extraire des bases taxables, un grand nombre d’équipements qui étaient jusqu’alors systématiquement imposés ! Cette diminution de l’assiette des impôts locaux implique de dresser au préalable un état des lieux des immobilisations foncières de l’entreprise puis de réaliser un diagnostic des installations spécifiquement adaptées aux activités industrielles…

Comment sécuriser vos demandes ?

Une fois la méthodologie mise en place au sein de l’entreprise, il convient d’établir une simulation du dégrèvement potentiel tant en matière de taxe foncière que de CFE. Ce travail de chiffrage devra être réalisé en parallèle pour ces deux taxes, même si l’exploitant n’est pas le propriétaire des bâtiments. Seront également prises en compte les éventuelles exonérations locales ou les opérations de restructuration de nature à avoir des impacts sur la valeur locative.

Sur la base de ce chiffrage, et de son argumentaire fondé sur l’arrêt GKN, l’entreprise pourra déposer une réclamation en matière de taxe foncière au titre des années N et N-1 et en matière de cotisation foncière des entreprises au titre des années N, N-1 et N-2, avant le 31 décembre de l’année N. Il reste donc encore quelques semaines pour effectuer un dépôt avant la fin de l’année 2022 !
La sécurisation de la demande de dégrèvement est renforcée lorsque l’entreprise a fait l’objet d’un contrôle fiscal récent qui s’est soldé par un rehaussement de la base foncière par les services fiscaux.

Pour conclure, il est important d’intégrer cette démarche « GKN » au quotidien à l’égard de travaux sans cesse renouvelés. Ce qui implique de mettre en œuvre une analyse récurrente des aménagements qui ne font pas corps avec le bâti et qui sont spécifiquement adaptés aux activités susceptibles d’être exercées dans un tel établissement industriel.

Précisons que les entreprises doivent déposer une déclaration de taxe foncière en cas de changement de consistance du local et pas seulement en cas de construction, extension ou démolition. Cette pratique est peu courante. C’est la raison pour laquelle, les établissements industriels font l’objet de contrôles fiscaux réguliers pour effectuer une mise à jour des bases foncières. Une bonne connaissance de ses bases par une attention régulière portée par les équipes en interne, permet d’éviter la hausse endémique des impôts locaux…

Quelles nouveautés pour 2023 ?

Comme vous avez pu le constater, le législateur s’est emparé du sujet des impôts locaux depuis plusieurs années. Après une réduction de moitié de la cotisation sur la valeur ajoutée (CVAE) actée dans le cadre du plan de relance en 2021, le projet de Loi de Finances pour 2023 promet une suppression à très court terme de cette taxe en 2 volets : en 2023, la CVAE serait diminuée de 50 %, avant d’être totalement supprimée à compter de 2024… Affaire à suivre !

 

Expertise par  Me Charlène Meleuc, avocat au barreau de Rennes.